mardi 7 juillet 2015

INTERDICTION DU ROUND-UP : COUP DUR POUR LE SEMIS DIRECT EN ALGERIE ?

INTERDICTION DU ROUND-UP : COUP DUR POUR LE SEMIS DIRECT EN ALGERIE ?
Djamel BELAID 15.05.15 djam.bel@voila.fr

L'OMS a déclaré que le Round-Up (glyphosate), un herbicide très utilisé en agriculture, présentait des risques pour la santé. A terme, il ôurrait être interdit. D'autres herbicides et fongicides pourraient suivre sur la liste de l'OMS. En Algérie, le Round-Up commence à être utilisé par les agriculteurs pratiquant le semis direct (SD). Il s'agit d'une technique nouvelle particulièrement adaptées aux zones semi-arides algériennes. Après la mise à l'index de cet herbicide, quelles alternatives s'offrent aux céraliers algériens ?

L'EMPLOI DES PESTICIDES EN AGRICULTURE.
En agriculture, les pesticides appelés également produits phytosanitaires ont permis des augmentations considérables de la production de produits alimentaires. C'est grâce à leur emploi et à celui des engrais que la faim a regressé dans le monde. La question actuellement posée est de savoir comment concilier augmentation de la production et emploi raisonné de ces molécules chimiques. En France, 60 000 tonnes de produits phytosanitaires sont utilisées chaque année. Ce chiffre est excessif. Il classe ce pays parmis les premiers pays utilisateurs de produits phytosanitaires. A partir de la tenue du « Grenelle de l'Environnement », des mesures ont été prises afin de réduire leur utilisation. L'agronomie algérienne est fortement influencée par les pratiques occidentales et françaises en particulier. Cette influence concerne aussi bien la prédominance accordée aux produits phytosanitaires que de nouvelles solutions biologiques contre certains ravageurs des cultures. Il peut donc être intéressant de s'inspirer des premiers acquis de l'agriculture « raisonnée » (avec moins de pesticides) développée à l'étranger.

II-ROUND-UP ET SEMIS DIRECT EN ALGERIE.
En semis direct, le Round-Up est utilisé avant de semer les céréales. Produit systèmique, cet herbicide est absorbé par les feuilles des mauvaises herbes présentes sur la parcelle. Le blé implanté sans labour n'est donc pas concurencé par les mauvaises herbes traditionnellement éliminées par le labour. On remplace en quelque sorte un labour mécanique par un labour chimique. Quel avantage offre une telle pratique ? Celui de réduire l'érosion du sol et de favoriser notamment une meilleure utilisation de l'eau par les plantes. Grâce à cette méthode, là où en année sèche l'agriculteur ne moissonne rien, le SD avec désherbage au Round-up permet d'obtenir au moins 10 quintaux de grains par hectare avec la paille correspondant.

Hors semis direct, les autres utilisations du Round-up en Algérie concernent le maraichage et l'arboriculture. Ainsi, avant de repiquer des plants de légumes en serre ou en plein champs, seul le Round-up est en mesure de lutter efficacement et en un très laps de temps contre des espèces vivaces telles le chiendent. Et cela sans toxicité pour la culture à venir contrairement aux herbicides racinaires. Il en est de même en arboriculture. Si l'agriculteur s'assure que le produit n'entre pas en contact avec les feuilles des arbres, il peut constituer un désherbant de choix.

II-EN ALGERIE, DU SEMIS DIRECT SANS OGM.
En Algérie, il n'y a pas d'OGM autorisés en culture comme c'est notamment le cas aux USA OU Amérique du Sud. Les exploitations de ces régions cultivent diverses cultures (soja, maïs, …) qui possèdent dans leur patrimoine génétique un gène permettant une résistance au glyphosate. Par conséquence, l'application de cet herbicide sur une culture résistante élimine toutes les espèces de mauvaises herbes sans porter atteinte à la culture.
Un tel schéma est particulièrement intéressant pour la firme Mosanto qui commercialise le Round-up et les semences OGM possèdant le gène de résistance à l'herbicide. Elle commercialise les semences OGM et donc également le Round-up. L'un ne vas pas sans l'autre. Ce schéma d'OGM est à priori intéressant pour l'agriculteur. Il peut ainsi éliminer des espèces particulièrement difficiles à éradiquer avec les herbicides traditionnels. Les premières années, ce schéma de départ a bien fonctionné. Mais peu à peu, les agriculteurs ont dû augmenter les doses de Round-up puis le nombre de passages. La cause ? L'apparition de résistances au glyphosate au sein des espèces de mauvaises herbes. Suite à des mutations et à la pression de sélection liée à l'utilisation renouvelée d'un même produit, des plants de mauvaises herbes sont apparus et se sont propagés dans les champs d'OGM.
Actuellement les agriculteurs argentins et brésiliens utilisant les OGM de la firme Monsanto sont obligés techniquement d'utiliser le Round-up et donc à des doses de plus en plus importantes.

On peut se demander à ce propos, si l'inscription par l'OMS du Round-up sur la liste des produits dangereux pour la santé s'est faite sur la base d'une seule utilisation en début de culture comme c'est le cas en semis direct ou sur la base de plusieurs applications avec majoration des doses comme dans le cas d'utilisation des OGM Monsanto résistant au glyphosate.

III-LES ALTERNATIVES AU ROUND-UP EN ALGERIE.
La récente mise en garde de l'OMS vis à vis du caractére potentielement dangereux du Round-up pour la santé humaine nécessite de prendre, en Algérie, les mesures adéquates. Nul doute que les services sanitaires et agricoles adopterons les mesures adaptées en fonction des conditions de dangerosité du glyphosate. A ce propos, on peut se demander si le glyphosate est potentiellement dangereux pour l'agriculteur qui manipule le produit, pour les riverains des champs traités ou pour le consommateur utilisant des produits traités.
Les produits issus de la décomposition dans le sol de la molécule de glyphosate le sol fait l'objet de nombreuses l'études de part le monde.

Même sans la sonnette d'alarme de l'OMS concernant le Round-up, l'utilisation d'un herbicide chimique dans une technique qui s'inscrit dans un modèle d'agriculture durable - cas de agriculture de conservation comme dans le cas du semis direct – c'est à dire d'une agriculture tendant vers le « bio » est quelque peu problématique dans son esprit.

En cas de dangerosité avérée du Round-up, l'idéal en semis direct serait son remplacement par un autre produit. Mais trouver un autre herbicide possédant les mêmes fonctions que le Round-up ne sera pas chose aisée vus ses qualités agronomiques.

Parmi les alternatives figurent le désherbage mécanique. Suite au « Grenelle de l'environnement » en France, des techniques nouvelles apparaissent. Elles permettent des avancées techniques surprenantes bien supérieures au traditionnel binage qui peut se pratiquer pour les cultures à large écartement. Passons en revue ces nouveaux procédés. Précisons que selon l'étage bioclimatique et la flore adventice présente, les problèmes de désherbages à résoudre sont très différents. C'est le cas en particulier les vivaces tel le chiendent, les chardons et toute plante ayant de profonds rhyzomes permettant le redémarrage de la plante malgré une première destruction de sa partie aérienne. Seul l'effet systèmique du Round-up permet de les détruire puisque une fois absorbé, le désherbant circule jusque dans les racines.

Certains agriculteurs européens en SD ont depuis de nombreuses année décidés de s'affranchir de l'emploi du Round-up. Ils utilisent des bineuses superficielles à pattes d'oie. Ces engins ne travaillent le sol que sur un à deux centimètres de telle façon que les tiges des mauvaises herbes soient sectionnées. Cette pratique reste inexistante en Algérie.
D'autres outils peuvent être utilisés. Ils sont vulgarisé en France par Arvalis. Il s'agit de la herse étrille et de la houe rotative. La première « peigne » la surface du sol arrachant ainsi les plantules germées quelques jours après une pluie d'automne. La seconde bine superficiellement le sol éliminant ainsi les plantules de mauvaises herbes.

La lutte mécanique en semis direct peut continuer après semis de la culture. Cela, à l'aide des deux outils précédemment évoqués. Ils présentent l'avantage de pouvoir travailler l'inter-rang telle une bineuse mais également le rang sans entraîner une forte perte de plants. Il s'agit pour cela d'effectuer sur l'appareil les réglages nécessaires et d'adopter une vitesse de travail apropriée.
Enfin, le désherbage chimique traditionnel (hors Round-up) avec des désherbants foliaires ou racinaires conserve toute sa place après semis.

EN CONCLUSION
Il s'agit de préciser quelle est la dangerosité réelle du Round-up. Par ailleurs, il reste à préciser si certaines précautions d'emploi peuvent y pallier.
En cas, d'obligation de s'abstenir de toute utilisation du Round-up, il reste à préciser quelles alternatives s'offrent aux céréaliers ayant commencé à pratiquer le SD associé au Round-up. Il s'agit là d'une urgence dans la mesure où il est prouvé que le SD sécurise le rendement, notamment en année sèche. Le SD est à ce titre primordial pour la réussite de la céréaliculture en zone semi-aride.

Si les services agricoles concernés ont une part importante dans la recherche de telles alterntives, les exploitants pratiquants le SD se doivent de mutualiser leur expérience. La diversité des situations et des conditions liées au sol et au climat obligent les exploitations à des pratiques variées. C'est dans ce foisonnement de pratiques qu'il y a lieu d'établir des « retour d'expériences » et de susciter la recherche de nouvelles façons de faire. Seules la connaissance de solutions testées sur le terrain permettront à la communauté des céréaliers de progresser.

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