vendredi 21 août 2015

CEREALES ALGERIE: RECUEIL D'ARTICLES Djamel BELAID.

Désolé, nous ne sommes pas arriver à inclure le fichier. Nous y travaillons.
Il s'agit d'un gros fichier de 209 pages.
Mais, le dossier est disponible sur notre site djamel-belaid.fr en PDF.
Merci de votre intérêt.

vendredi 7 août 2015

CCLS CONSTANTINE, FAIBLESSE DE LA COLLECTE

ORGE - AVOINE
CCLS CONSTANTINE, FAIBLESSE DE LA COLLECTE

Selon Le Quotidien d'Oran, la CCLS de Constantine connait une faible collecte d'orge et d'avoine. Ainsi, seuls 3919 qx d'orge ont été collecté contre une production estimée à 74 000 qx. Concernant l'avoine ces chiffres sont respectivement de 282 qx pour 8842 qx produits.
Cette situation s'explique par la tension sur le marché des aliments du bétail et de la semence. Les producteurs semblent préférer garder leur production pour leur propre cheptel ou pour la revendre à des tarifs plus rémunérateurs. Cette situation particulière amène à rechercher quelles pourraient être les meilleures formes de commercialisation de ces produits.

UNE SITUATION INQUIETANTE ?

Cette situation est-elle inquiétante ? Oui, si on se place du côté de la CCLS. Celle-ci doit être en mesure de répondre à la demande à venir en orge et avoine comme aliment du bétail et comme semences. La CCLS locale comme toute CCLS a pour rôle de fournir les agriculteurs.

Apparemment, un marché hors CCLS existe. Faut-il blâmer les agriculteurs? A chacun de juger. Il nous semble que face à la demande en ces deux produits le rôle des CCLS est d'aider les agriculteurs à produire plus et cela pour le plus grand nombre.

Pour les agriculteurs qui ont conservé leur production d'orge ou d'avoine, la première priorité est de la conserver dans de bonnes conditions. Pour cela, les services agricoles, en collaboration avec des constructeurs locaux devraient les aider à se procurer du matériel de stockage : cellules métalliques, convoyeur, vis sans fin. Pour ceux qui conditionnent leur propre semence, ces mêmes services agricoles devraient aider les producteurs à acquérir :
-des trieurs afin de séparer les grains de céréales des graines de mauvaises herbes et des diverses impuretés,
-des appareils de traitements des semences afin de leur apporter insecticides et/ou fongicides (parfois une simple bétonnière peut permettre ce mélange).

Certes, ces opérations requièrent une certaine technicité. Il s'agit également pour chaque agriculteur producteur de « semences de ferme » de renouveler chaque année auprès de la CCLS une partie de ses semences afin d'éviter tout processus de dégénérescence.

Il nous semble qu'au lieu de regretter que les agriculteurs ne leur confient pas leur production, les cadres et employés des CCLS devraient apprendre aux agriculteurs les techniques de production de semences.

Par ailleurs, les cadres et employés des CCLS devraient apprendre aux agriculteurs comment mieux valoriser l'orge. Chacun sait que l'orge concassée est mieux utilisée par les ruminants. Mais peu savent que de l'urée 46% (engrais azoté) peut être apporté dans les rations comportant de l'orge. Et cela à raison de 20 grammes d'urée pour 500 grammes d'orge.

L'urée apporte de l'azote que la microflore des ruminants (ovins, bovins, caprins) sait utiliser contrairement aux monogastriques (volailles).

CCLS : « RAZK EL BEYLIK »

Cette situation de collecte réduite d'orge et d'avoine au niveau de la CCLS de Constantine mais aussi d'autres régions illustre à notre avis, le divorce qui peut exister entre les intérêts des agriculteurs et des structures administratives telles les CCLS.
Rappelons que les CCLS sont des antennes de l'OAIC qui est un office public. Bien que les CCLS portent le nom de « coopératives », elles ne sont en rien de vraies coopératives. Par définition dans une coopérative, les murs et le matériel appartiennent aux sociétaires car en achetant des parts sociales, ils en sont devenus propriétaires ; par ailleurs, le directeur est nommé par les agriculteurs et non pas nommé par la tutelle.
Actuellement dans l'esprit des agriculteurs les CCLS sont considérés à juste titre comme structure publique « razk el beylik ». Nous pensons que cet état d'esprit est un obstacle au développement agricole. Dans une vraie coopérative, la question de la collecte de l'orge et de l'avoine serait débattue entre sociétaires. Des solutions pourraient être trouvées.

ORGE, PASSER D'UN MARCHE FORMEL A UN MARCHE OFFICIEL

Etant donnée la tension actuelle sur le marché de l'orge et de l'avoine, des solutions originales seraient à trouver.
Précisions qu'une vraie coopérative – nous préférons employer dans un premier temps le terme de groupement de producteurs – ne réunirait pas tous les agriculteurs d'une petite région. Bien sûr nous ne sommes pas naïf, nous sommes conscient des intérêts contradictoires au sein des sociétaires. Mais une coopérative est le prix à payer pour survivre. Elle réunirait, dans un premier temps les agriculteurs les plus conscient de la nécessité de mettre leur force en commun au niveau de la commercialisation de leurs productions ou de leurs achats.

Les solutions à trouver se feraient aux yeux de tous. Elles se feraient au niveau d'une structure officielle et non dans l'informel comme actuellement. Certes, il y aurait des tensions. En effet, les éleveurs sans terre seraient demandeurs de grosses quantités d'orge. La fixation d'un prix libre de marché permettrait de les départager.

Parmi les membres du gouvernement, certains ministres dont Mr Belaib ont clairement indiqué la nécessité de parler un langage de vérité au « peuple algérien à propos de la balance entre avantages et inconvénients à attendre d'une adhésion future de l'Algérie à l'OMC.

Concernant les CCLS et la commercialisation des céréales, en cas d'adhésion de l'Algérie à l'OMC, les opérateurs algériens auraient le libre choix de l'importation de céréales. L'OMC se base sur les seules forces du marché concernant la commercialisation des produits agricoles. Cela signifierait l'arrêt du monopole du commerce de céréales par l'OAIC et donc de profonds remaniements au sein des CCLS. Qu'en serait-il de leur activité de collecte de l'orge, de l'avoine mais également du blé ?

Depuis 2005, le Maroc a adhéré à l'OMC, ce qui a amené à la réduction considérable de l'office marocain des céréales.

GROUPEMENTS DE PRODUCTEURS, UNE ALTERNATIVE AU CENTRALISME ADMINISTRATIF

Etant données ces évolutions probables du marché des céréales en Algérie, il nous semble nécessaire de se projeter dans le futur. Cela est nécessaire à tous les niveaux : céréaliers, éleveurs, cadre et employé de CCLS.
Les intérêts des céréaliers et éleveurs peuvent être divergents. Les céréaliers peuvent être intéressés par des rotations longues comprenant des oléagineux (tournesol et colza) alors que les éleveurs et notamment les éleveurs avec peut de terre peuvent être intéressés par des tourteaux importés à bas prix.
Dans tous les cas, que ce soient cadres ou employés de CCLS, céréalier ou éleveur, petit paysan ou gros propriétaire terrien et membre des élites rurales ou simple chômeur chacune de ces composantes a intérêt à l'émergence de groupements de producteurs. Seuls de telles structures sont en mesure de défendre leurs marges, de valoriser les productions locales et de créer de l'emploi en milieu rural.

La recherche de solution à la question posée par le directeur de la CCLS de Constantine, à propos de la collecte de l'orge et de l'avoine dans son secteur peut être l'occasion à imaginer de nouvelles formes de solidarités entre producteurs. Face à l'OMC et à l'application intégrale dès 2020 de l'Accord d'Association Economique Algérie-Union Européenne, le plus vite sera le mieux.

Nb : il s'agit là d'une réflexion que nous serions heureux de prolonger avec ceux qui nous font l'amitié de nous lire. Leurs commentaires sont les bienvenus.






RAPPORT METBOUL POUR L'AGRICULTURE DZ, OUI MAIS...

PROSPECTIVE
RAPPORT METBOUL POUR L'AGRICULTURE DZ, OUI MAIS...
La presse poursuit la publication du Rapport sur l'économie algérienne remis par le Pr METBOUL à Mr Sellal. Ce rapport comprend plusieurs parties et se veut une contribution pour une relance économique en Algérie. Ce rapport comprend un volet concernant l'agro-industrie. Nous proposons une relecture critique.

Ce rapport a le grand mérite d'exister. Il faut à ce propos féliciter le Pr Metboul d'avoir réunit un comité d'experts afin de dégager des propositions d'action. Nous aurions cependant souhaité une participation plus large d'agro-économistes à la rédaction de la partie consacrée au secteur de l'agro-industrie.

D'emblée, les rédacteurs notent : « Nous devons donc avoir une approche holistique, le développement de la grande distribution dépend de l’agro-industrie qui dépend à son tour de l’agriculture qui ne pourra se développer sans un investissement dans le réseau hydrique conséquent ».

LES POINTS POSITIFS DU RAPPORT ET CE QUI MANQUE
Ce rapport comporte de nombreux points positifs. C'est le cas par exemple lorsqu'il note la fragilité du milieu semi-aride et la nécessité d'adopter les techniques les plus appropriées de travail du sol. C'est également le cas en prônant le développement de coopératives agricoles, de formation ou de la nécessité d'un observatoire.

Il nous semble que certains points de ce rapport mériteraient d'être enrichis des propositions faites lors de colloques qui se sont tenus en Algérie et par les propositions de différents agro-économistes algériens et étrangers reconnus pour leur maîtrise des questions de développement au Maghreb.

Dans ce rapport, il manque une analyse des actions entreprises localement par le MADR, une sorte de bilan d'étapes. Pour les décideurs il est important de trouver des réponses aux questions qu'ils ne manquent pas de se poser : « Où en sommes nous ? Pourquoi cela n'a pas marché ? Vers où nous ré-orienter ? ».
Ainsi, quand il est question de cluster, nulle trace d'une analyse des pôles agricoles locaux actuellement mis en place depuis quelques années sous l'égide du MADR. Les auteurs semblent ne pas savoir que cette démarche a été adoptée par les pouvoirs publics. Ils restent dans l'évocation de l'intérêt de telles structures en évoquant les clusters français d'Agen de Marmande ou de ceux de la Silicon Valley. On aurait aimé des propositions basées sur l'analyse de la situation de l'activité actuelle des pôles d'excellence déjà en place pour le lait, les céréales ou les pommes de terre.

Le rapport n'aborde pas la question de la protection des marges des producteurs, ni l'importance de consolider des filières ni le rôle des associations professionnelles et syndicats agricoles.
Enfin, rien sur les perspectives de l'accord d'association Algérie-UE où des cons équences d'une adhésion à l'OMC.

Concernant l'hydraulique on peut lire « la nappe albienne n’est pas encore exploitée par l’Algérie alors que la Libye et le Maroc s’y emploient déjà ». Rien n'est dit concernant l'utilisation durable de cette source ressource et des risques de salinisation des terres.

Par ailleurs, le dry-farming est jugé comme technique intéressante alors que chacun sait qu'elle constitue une des causes de la forte érosion des terres.

Concernant l'élevage, après quelques considérations générales, on peut lire : « Pour que ces éleveurs soient considérés comme des entités économiques, il faut que leur exploitation se compose d’au moins 20 bêtes ». L'idée est généreuse, mais comment procéder quand on sait que nombre d'éleveurs sont en hors-sol ou ne disposent pas de la surface de terre sufisante pour accéder à une autonomie fourragère ? Au delà des incantations, que proposer de concret aux cadres de terrain et aux DSA ?


Le rapport comprend par ailleurs quelques formulations malheureuses. Ainsi, on peut être étonné de lire que « le maraîchage et l’élevage sont délaissés par les agriculteurs ».
On peut également être étonné de lire que « Atteindre les objectifs de souveraineté alimentaire, de sécurité alimentaire, de développement rural, de préservation des emplois et de l’environnement, implique que l’Algérie y consacre enfin un budget ambitieux ». Chacun sait que ces dernières années des centaines de millions de dollars ont été consacrés au développement agricole.

CONCLUSION
A la lecture de ce rapport, c'est un sentiment de gène et d'insatisfaction qui saisit le lecteur au fur et à mesure des pages. A sa lecture l'impression qui domine est celle d'une analyse non approfondie.
Il nous semble qu'un tel rapport ne devrait pas être un simple catalogue de propositions. Il doit être également un descriptif d'actions prioritaires avec à chaque fois expliqué les conséquences et les implications attendues. A ce titre, ce rapport s'adressant à Décideurs de différents secteurs d'activités, il nous semble que sa rédaction devrait être plus pédagogique. Il est nécessaire d'indiquer les « tenants et aboutissements » espérés des mesures proposées et ce qui les motive. Ainsi, des propositions importantes ne doivent pas être noyées dans le flot d'exemples parfois anecdotiques.
Assez bien disposé en début de lecture de ce rapport du fait de la signature prestigieuse du Pr Metboul, nous avons vite dû déchanter par le ton généraliste et parfois superficiel de ce document. Nous avons eu parfois l'impression d'un mémoire rédigés par des étudiants de master alors que l'ambition première est de proposer une feuille de route pour M Sellal.

Il s'agit donc de le considérer comme un « premier jet » et de poursuivre sa rédaction quitte à élargir ses contributeurs et à nourrir la réflexion de la lecture de travaux antérieurs1. Travaux accessibles sur la toile et qui permettent de resituer le développement de l'agriculture algérienne dans le cadre plus large de la mondialisation.
1Nulle trace dans les propositions des deux auteurs d'une lecture d'économistes qui font autorité en la matière : A. Benachenou, O Bessaoud, S. Bedrani, Rastoin, … etc.

ALGERIE. AMAP du COLLECTIF TORBA.



Cet article a pour objectif de présenter ce qu'est le fonctionnement d'une AMAP à la lumière d'une première expérience réussie d'un groupe de consommateurs à Alger.
Rahal Karim "Cultivons notre santé"

Qu’est-ce qu’une AMAP ? c’est littéralement une Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne, par le développement d’une formule de vente directe entre producteur (de légumes, fruits, fromage, œufs ou viande) et un groupe de consommateurs. Ces consommateurs intéressés préfèrent généralement des produits sains, exempts de produits chimiques cancérigènes. ils s’organisent pour acheter la production et la distribuent en un point de vente, situé chez nous à Ouled fayet.
L’expérience de l’AMAP d’Alger a commencé par la rencontre avec un agriculteur paysan situé dans la région de Bouinane, à 800 mètres d’altitude au sein du Parc National de Chréa. Il s’agit de Rachid et sa famille, un paysan jovial très sympathique et accueillant, et qui a vite compris notre besoin de produits naturels, nos préoccupations des gens des villes qui souhaiteraient à tout prix fuir le monde urbain et ses pollutions, son stress…
Nous nous sommes donc rapidement entendus de lui acheter sa production de fruits et de légumes, à condition qu’elle ne soit pas traitée chimiquement. Nous gagnons par rapport à l’innocuité des légumes achetés, mais aussi pour le goût et la saveur de ces aliments cultivés à partir de graines locales, qui ont grandi naturellement, sans être boostées par des engrais chimiques, comme c’est le cas actuellement un peu partout.
Le prix convenu est équitable, proche de celui du marché, sachant que les deux parties se trouveraient gagnantes, à partir du moment où Ammi Rachid n’aura pas à revendre sa production chez un intermédiaire qui va lui acheter 30% moins cher, ou qu’il n’aura pas à passer la journée à vendre sur la route la quantité qu’on lui achète au même prix.
Une petite différence avec un maraicher intensif, c’est que notre paysan en doit pas faire de la mono-culture, mais plutôt diversifier et étaler ses cultures dans le temps, afin de nous livrer régulièrement dans la saison. Pour lui, diversifier au maximum lui permet de limiter ses pertes si jamais il avait un aléa climatique ou un problème de maladie.
Evidemment, nous en tant que consommateurs Bio n’allons pas rechigner si les produits ne sont pas de taille standard comme dans les marchés, s’ils sont tâchés ou présentent des piqures d’insectes ou sont difformes. Ça veut dire que le maraicher nous vend tout ce qu’il produit, sans avoir à mettre de côté ce qui n’est pas standard. Nous avons donc fait signer une charte mentionnant bien que l’adhérent accepte un produit qui serait non standard, et avec un prix qui ne saurait excéder 20% le prix du marché.
Le producteur nous livre donc chaque samedi sa production au point de rencontre à Ouled fayet, et deux adhérents s’occupent de la pesée et de la distribution des légumes et fruits dans chacun des paniers. Chaque adhérent est tenu de s’occuper de la distribution au moins une fois par saison.
L’AMAP comme son nom l’indique n’est pas seulement un moyen de se procurer des aliments bio auprès du producteur, mais également une occasion de soutenir ce genre d’activité en voie de disparition. En effet, devant le raz de marée de la production maraichère utilisant les produits chimiques en quantité (au dépend de la qualité), tout producteur qui cherche à vivre de sa production serait tenté, pour ne pas dire obligé, d’utiliser des produits chimiques. Donc pour maintenir tant que possible ce type d’activité qui devient atypique chez nous, il est de notre devoir non seulement de lui acheter sa production à un prix qui lui permet de garder cette activité, mais aussi de le soutenir dans des projets qu’il peut avoir dans sa ferme.
C’est ainsi que nous avons d’ores et déjà investi avec Ammi Rachid dans l’extension de ses vergers, en lui achetant près de 500 arbres fruitiers (pommiers, figuiers, pruniers, oliviers, cognassiers, vigne). L’objectif de ce projet était de diversifier ses sources de revenus, mais aussi de lutter contre l’érosion qui menace cette ferme de montagne. Enfin, nous souhaitions développer l’agroforesterie,  qui est une forme d’agriculture qui fait ses preuves dans le monde, et qui montre que l’agriculture avec des arbres forestiers est plus rentable que seulement maraichère. Pour financer ce projet, nous avons fait appel à la solidarité de personnes qui étaient d’accord de souscrire à un contrat solidaire, en finançant un certain nombre d’arbres fruitiers, à raison de 100 DA / arbre. Ce pré-financement permet de bénéficier prioritairement des fruits produits, au bout de 2 ou 3 ans. Cette opération a été une réussite et appelle à être étendue à d’autres localités. En effet, il est reconnu que pour lutter contre l’érosion, la désertification et le réchauffement climatique, rien ne vaut la plantation de millions d’arbres. Nous avons suffisamment de marge de progrès !
Une autre action d’investissement solidaire a été la construction d’un poulailler fermier avec des matériaux écologiques (bois, paille, plante locale appelée Diss). De la même façon, les souscripteurs ont avancé une somme d’argent (de 2000 à 9000 DA) pour acheter les matériaux et le retour sur investissement se fera par la vente promotionnelle de poulet fermier.
Notons que tous les 15 jours une visite est programmée par les membres de l’AMAP à la ferme de Ammi Rachid, où ils auront à loisir de discuter avec le producteur, visiter les champs de cultures maraichères, les vergers d’arbres fruitiers, les étables d’animaux (vaches, brebis, chèvres, poules…) et consommer dans la convivialité un déjeuner sur place, fait à base de produits locaux entièrement cuisinés par la famille de Rachid. Un super-moment convivial, qui permet de mieux se rendre compte des conditions dans lesquelles les aliments sont cultivés, et transformés. C’est aussi une occasion unique de ressourcement dans un cadre
Collectif Torba. Voir la page sur Facebook.


Lu ce jour sur le blog "paysans d'Algérie" ce commentaire.


bonjour je viens de decouvrir votre site tres interessant. pour info la 1ere AMAP est née a alger le 25 septembre avec le Collectif Torba devenu une association.
nous recevons nos legumes de djnane bouinan chez un maraicher traditionnel. les legumes sont payes a l’avance (en debut de campagne) et nous avons une petite ferme mise a notre disposition par un de nos membre a titre experimental. nous faisons nos formations avec des agriculteurs qui respectent la nature cest a dire sans pesticides et nous apprenons la permaculture avec des benevoles qui sortent de leurs bureaux pour venir jardiner. voir page facebook
collectif Torba et Amap alger.

jeudi 6 août 2015

AVICULTURE: M . FERROUKHI SOUHAITE REDYNAMISER LA FILIERE

AVICULTURE
VERS UNE REDYNAMISATION DU SECTEUR
Rencontrant en ce début de mois d'août des producteurs puis le Conseil Interprofessionnel de l'Aviculture, le Ministre de l'Agriculture a souhaité une meilleure efficacité de la filière. Il a ainsi exprimé le souhait d'un « développement durable » de cette filière stratégique pour la fourniture de protéines animales aux ménages.

RATIONALISER L'ORGANISATION DES ELEVAGES AVICOLES
Par « développement durable », le Ministre entend notamment aller vers l'officialisation de l'activité de nombreux éleveurs. Souvent ceux-ci utilisent des serres comme poulailler et nombreux sont ceux qui agiraient dans le secteur informel.
Rendant compte de l'activité ministérielle, Amokrane H donne différentes informations dans le quotidien Horizon du 6 août. Il apparaît qu'une des contraintes rencontrées par les éleveurs concerne le prix de l'aliment pour volailles. Selon des éleveurs la suppression de la TVA sur le maïs et les tourteaux de soja importés profitent plus aux importateurs et fabricants d'aliments pour volailles qu'aux producteurs et consommateurs.

A ce propos les niveaux de prix sont un indicatif du rapport de force exercé par les intermédiaires. Les éleveurs cèdent actuellement leurs produits à 170 DA/kilo contre 360 DA/kilo concernant les bouchers.

Les producteurs réclament l'intervention des pouvoirs publics afin de les protéger des risques de baisse des prix.

REVENU DES AVICULTEURS, CERNER LES VRAIS PROBLEMES

Il est quelque peu étonnant que les aviculteurs réclament l'intervention des pouvoirs publics afin de protéger leur revenu sans même essayer de s'organiser. La puissance publique intervient déjà avec la suppression de la TVA sur l'aliment volailles. Par ailleurs, est-ce à l'Etat de s'occuper de ce dont se nourrissent les poules ? N'est ce pas le rôle de l'inter-profession ?

Comme noté plus haut, ce ne sont ni les éleveurs ni les conommateurs qui profitent de la baisse de la TVA sur les importations de maïs et tourteau de soja. On atteint là les limites de l'action de la puissance publique.

Aussi, il nous semble que c'est aux producteurs à s'organiser et accessoirement aux consommateurs de développer des AMAP. Aux producteurs à s'organiser en groupements de producteurs afin de produire leur propre aliment volaille. S'il y a une chose à demander aux pouvoirs publics, les représentants des éleveurs ont à demander au MADR de pouvoir bénéficier des mêmes avantages que les importateurs. Enoncée ainsi, cette proposition semble irréelle et bien ambitieuse vu les rapports de force actuels entre importateurs et éleveurs.
Mais n'est ce pas là la question centrale ? Si des groupements d'éleveurs organisés librement sur la base d'une adhésion volontaire à un tel programme de production d'aliments pour volailles, les marges des éleveurs seraient meilleures. Ainsi, la suppression de la TVA bénéficierait au plus grand nombre.
Il faut signaler qu'à l'étranger de tels groupements existent. Ils achètent une partie de la matière première aux céréaliers et assemblent dans leurs ateliers les différentes formules selon les besoins des élevages de poulets de chair ou de ponte. Lorsque de telles structures ont la taille suffisante, elles recrutent même des vétérinaires et techniciens qui assurent un appui technique au niveau des élevages des sociétaires.
Si M le Ministre souhaite réellement solutionner de façon « durable » la protection du revenu des aviculteurs, il doit encourager ce type de démarche. De tels groupements ont toute leur place à côté des fabricants privés d'aliments, des Cassap et des grossistes. Ainsi organisés, les producteurs permettraient de faire jouer une saine concurrence. L'ONAB pourrait apporter au départ une aide technique à de tels groupements.

De tels groupements pourraient également enrichir leur activité par des achats groupés de médicaments vétérinaires mais également par le développement de moyens pour la conservation des produits avicoles voire même la vente directe aux consommateurs et collectivités locales.

ALIMENT VOLAILLE, 100% IMPORTE

Arriver à un développement « durable » de la filière passe également par une réduction du poste des importations de maïs et de tourteaux de soja nécessaires à la confection de l'aliment pour volailles.
La production locale de maïs est insignifiante malgré les efforts de l'OAIC et l'ITGC. Cette culture réclame beaucoup d'eau. Outre la maîtrise de son itinéraire technique peu familier pour les agriculteurs, cette culture nécessite une irrigation de type goutte à goutte. Quant au soja, il est pratiquement inexistant localement.

Maïs et tourteaux de soja sont produits par des agriculteurs européens et américains au niveau d'exploitations agricoles à la forte productivité.
Produire ces matières premières localement nécessite une politique de subventions publiques qui risque d'être remise en cause dès 2020 par l'application intégrale de l'accord d'association DZ-UE et par une éventuelle signature de l'Algérie à l'OMC. Par ailleurs, les producteurs américains développent de fortes pressions afin de placer leur tourteau dans les pays du Maghreb. Un accord avec le Maroc existe déjà depuis plusieurs années . Cet accord a ruiné la jeune industrie locale de trituration de graines oléagineuses produites localement et a entraîné la baisse des superficies de tournesol et colza.

En effet, le tourteau de tournesol ou de colza peut être remplacé dans la fabrication d'aliments pour bétail par le tourteau de soja. Celui-ci, même importé, étant moins cher que le produit local, les importateurs marocains se sont détournés de la production locale. Celle-ci ne pouvait plus être subventionnée selon les termes de l'adhésion à l'OMC. La seule loi applicable devant être celle des forces du marché. Seule l'application d'une TVA est acceptée.

FILIERE AVICOLE, DES QUESTIONS CONJONCTURELLES ET STRUCTURELLE

Assurer un développement « durable » de la filière avicole nécessite donc des actions dans différentes directions1. La volonté du MADR d'arriver à ré-intégrer dans le giron de la filière les aviculteurs agissant dans l'informel est à saluer. De même que la volonté de développement les moyens de conservation des produits avicoles.

Comme dans de multiples filières agricoles, il s'agit de protéger les marges des aviculteurs. Cela en encourageant la mise en place de groupements de producteurs.
Par ailleurs, il s'agit de renforcer les capacités de production locale de substituts au maïs et au soja. L'orge, les triticales, la féverole, le tournesol et le colza peuvent permettre partiellement cette substitution. Des itinéraires adaptés2 peuvent permettre la réussite de ces cultures. L'utilisation d'enzymes agissant sur les facteurs anty-nutritionnels peut également permettre d'utiliser plus d'orge à la place de maïs.
Sur le plan du mode de consommation alimentaire, on ne peut laisser l'omelette frite prendre une place prépondérante aux dépends de la diète méditerranéenne (couscous aux légumes et pois-chiche, garantita, …) bien plus équilibrée du point de vue diététique.

L'amélioration de l'efficacité de la filière avicole passe donc par des mesures conjoncturelles mais également structurelles. Seule la combinaison des deux assurera la durabilité de la filière.
1 Nous n'avons nous pas abordé la question des souches de poulets actuellement utilisées localement.
2Voir nos précédents articles sur cette question.

mercredi 5 août 2015

DEVELOPPEMENT AGRICOLE: VOLONTE DE BIEN FAIRE, MAIS INCOHERENCES DU MADR.

DEVELOPPEMENT AGRICOLE
MALGRE UNE VOLONTE DE BIEN FAIRE, LES INCOHERENCES DU MADR.
La profession agricole semble avoir accueilli avec enthousiasme la nomination le 25 juillet dernier de Mr Did-Ahmed Ferroukhi au poste de Ministre de l'agriculture. Les premières déclarations et gestes de ce dernier montrent une réelle volonté d'aller de l'avant. Cependant, concernant le faible niveau de structuration du monde paysan et sa plus grande implication dans la capacité à participer à l'élaboration et à la mise en œuvre d'une politique de développement agricole, il ne semble pas encore se dégager de ligne d'action réellement novatrice. Que ce soit le nouveau titulaire du poste, ses prédécesseurs ou les cadres des administrations centrale et régionale, les tendances au centralisme administratif restent profondément ancrées dans les esprits.

POMME DE TERRE, PRIORITE AU STOCKAGE PRIVE
Lors de son déplacement à Bouira en ce début de mois d'août le Ministre a rencontré les producteurs de pomme de terre. Ces derniers se plaignent d'une baisse des prix à la production. En effet, les grossistes en mandataires proposent des prix moyens de 15 DA/kilo contre le double en moyenne durant le ramadhan. Cette situation s'explique également par l'arrivée sur le marché de la nouvelle récolte. Le président de l'association locale des producteurs de pommes de terre a même brandit le risque de faillite de nombre d'exploitations face à cette situation.
Le Ministre a donc indiqué que dorénavant les structures privées de stockage seraient mobilisées afin d'assurer l'entière conservation de la récolte en cette période de mévente. En période de crise, on comprend que l'urgence est de trouver des solutions immédiates aux problèmes des agriculteurs.

Cependant, on peut regretter que le Ministre n'ait pas appelé les producteurs à unir leurs forces afin de créer des groupements de producteurs et investir dans des structures communes de stockage. Car, partout à l'étranger, les agriculteurs investissent dans de telles structures ; que ce soit pour les légumes, les fruits, le lait ou les céréales.

PROSPECTIVE ET ATONIE DU MADR
On aurait pu s'attendre à ce que les cadres du MADR poussent dans ce sens. Or, à notre connaissance, l'idée de telles structures de stockage et de commercialisation semblent inconnue de nos décideurs.
Certes, les cadres de l'INVA organisent des campagnes d'information sur les groupements de producteurs, par exemple pour l'achat de matériel à plusieurs exploitants. Mais à part ces actions, on ne remarque aucune directive du MADR.
Nous souhaitons être bien clair, il ne s'agit pas là de suggérer un retour aux années 70 et de proposer à nouveau la constitution de CAPRA et de CAPCS. Mais d'insuffler une dynamique locale pour la constitution de grandes coopératives privées céréalières ou d'élevage telles qu'elles existent par exemple en Europe dans des économies libérales.

Ne pas aider les producteurs algériens à se réunir sur la base d'une libre initiative et d'une adhésion volontaire en groupements de producteurs, c'est les laisser poings et pieds liés au secteur privé local aux firmes agro-alimentaires et aux grosses coopératives européennes dès qu'en 2020 l'accord d'association DZ-UE fera sauter les barrières douanières. C'est à terme les mener à une mort lente et à donc accélerer l'exode rural . Cela avec pour corolaire pour les pouvoirs publics de devoir nourrir, à partir des ports, des populations essentiellement urbaines.

A l'heure de la mondialisation des échanges internationaux, les agriculteurs algériens vont devoir affronter d'autres agriculteurs à la productivité bien supérieure. Tout doit être fait afin de les y préparer.

Concernant le secteur privé local, agriculteurs et consommateurs ont pu tester sa voracité. Plusieurs travaux d'agro-économistes montrent que les subventions publiques au secteur agricole passent en définitive dans leur escarcelle. Plus que jamais la voie des groupements de producteurs apparaît donc comme un outil de sauvegarde des intérêts du monde paysan et rural.

COMMERCIALISATION, ATTENTION, DANGER
Comment expliquer cette absence de vision à long terme des Décideurs du MADR ? Il nous semble que cela est lié à un manque de culture professionnelle et à une déconection par rapport aux réalités du terrain. L'origine sociale de ces cadres peut également expliquer cet état de fait.
Chose plus grave, même à la tête de l'UNPA, la notion de groupements de producteurs est inexistante. Cette notion est pratiquement inexistante en Algérie, si ce n'est dans le monde universitaire qui a consacrer un colloque à Blida ces dernières années.
Mais le plus grave à nos yeux est le manque d'initiatives à la base. Car, s'il est vrai que de tels groupements ne peuvent voir le jour et prospérer que dans un environnement juridique et fiscal adapté, c'est la demande de la base qui est le moteur essentiel. Dans le cas français, la structuration du modèle coopératif agricole s'est accompagné d'un syndicalisme paysan fort, de la formation de cadres paysans dans des maisons rurales et s'est appuyé sur des associations telles par exemple les Jeunesses Rurales Chrétiennes.
C'est dire le terreau nécessaire à l'émergence à de tels groupements de producteurs. Notons que ces groupements ou coopératives n'ont rien à voir avec nos « coopératives » locales qui ne sont la plupart du temps des antennes d'offices tel l'OAIC, concernant les CCLS, ou des antennes des services agricoles. En Algérie, les structures « coopératives » sont dévoyées, elles ne correspondent pas au concept coopératif tel qu'il est admis au niveau international.

MADR, UNE ATTITUDE PATERNALISTE
Un autre exemple est donné de l'attitude paternaliste des cadres du MADR vis à vis du monde paysan. Ainsi, le 2 août dernier la presse nationale note que « M. Ferroukhi a indiqué à cet effet que le ministère instruira les wilayas, les comités et les chambres d'agriculture pour faire participer les agriculteurs aux débats pour qu'ils puissent exposer leurs préoccupations ».

Chacun a bien lu, des instructions pour faire « participer les agriculteurs aux débats ». L'intention est louable. La question est de savoir à quel moment de la prise de décision les agriculteurs seront associés. Trop souvent jusqu'à présent le principe de subsidiarité est resté inconnu des cadres du MADR. Dans une démarche de subsidiarité active, l'essentiel consiste dans le processus de mise en place de solutions et non pas dans la reproduction systèmatique de modèles.

Comme le note Denis Pommier1 « Une association, un groupement, une coopérative, une mutuelle , sont des outils entre les mains de leurs membres pour résoudre leurs problèmes. Ce sont eux qui doivent poser les questions... et qui doivent chercher les réponses. Ce n'est qu'une fois, et une fois seulement que les questions et les réponses sont posées que l'Etat peut intervenir utilement pour appuyer les projets des agriculteurs et non pas exiger des agriculteurs de participer à des projets planifiés par les ministères ».

Souvent des programmes de développement sont mis au point dans les bureaux climatisés du Ministère puis ensuite, le monde rural est convié pour dire « amen ». Afin d'arriver à un développement authentique, la logique des choses voudrait que le monde paysan soit convié en amont pour participer à la rédaction des projets.

La même démarche existe en matière de vulgarisation agricole. Celle-ci est souvent de type « top-down » et se manifeste par des « caravanes » de techniciens qui sillonent les campagnes. Si l'intention est louable, rien ne remplace l'enquête culture2 ou enregistrement de performances de type « bottom-up » qui permet d'approfondir les itinéraires techniques sur la base des données propres aux agriculteurs d'une petite région. « Dans la pratique, l'un des mécanismes les plus efficients pour la recherche de solution techniques et la diffusion durable de ces innovations a été l'échange horizontal et la coopération entre les agriculteurs eux-mêmes3 ».


GROUPEMENTS DE PRODUCTEURS , S'APPUYER SUR LES ELITES RURALES

En Algérie, dans le cas du stockage de leurs produits, les agriculteurs et notamment les producteurs de pomme de terre n'ont de perspectives qu'entre le centralisme administratif des services agricoles et des antennes d'offices ou des structures privées. Or, il existe une autre voie, celle du stockage au niveau de groupements de producteurs. Chacune de ses formes d'organisation doit avoir sa place dans l'économie locale. Le MADR se doit ce se préoccuper de cet équilibre.
Cet exemple illustre les schémas anciens ancrés dans les esprits des cadres mais aussi du monde paysan.
Tout agent de développement agricole, quelque soit sa position, doit avoir en tête que la performance de l'agriculture ne dépend pas uniquement de la capacité d'action des institutions publiques. Certes, celles-ci ont une part déterminante dans la fixation des prix. Mais ces performances dépendent avant tout des agriculteurs et surtout de leur capacité à se mobiliser, à s'organiser et à investir . C'est à dire du degré de confiance qu'ils peuvent accorder à des institutions qu'ils auront eux mêmes créés : associations professionnelles, syndicats agricoles, groupements de producteurs.

Aussi, les agents de développement du MADR se doivent de rechercher les structures paysannes et rurales qui émergent depuis ces dernières années suite à la promulgation d'une loi sur la liberté d'association. Ces structures sont des éléments essentiels dans toute politique de développement. De même que des résultats insuffisants doivent être analysés à la lumière du niveau de leur participation .

Oublier la possibilité de futurs groupements de producteurs, c'est continuer à livrer au marché des producteurs sans aucune protection et pouvoir de négociation par rapport à l'amont et l'aval. Or, les lois du marché sont impitoyables face à des paysans inorganisés. Les producteurs de pomme de terre et de lait en sont un exemple. Certes une telle démarche ne se fera pas du jour au lendemain. Cependant, c'est la seule voie garantissant les intérêts du monde paysan. De tels groupements ont leur place dans une économie régit par les lois du marché. Il ne s'agit nullement d'aller contre ces lois.

L'expérience de l'agriculture européenne montre que la participation active des agriculteurs dans la définition des politiques agricoles est un préalable déterminant de la pertinence et de leur justesse comme elle est également un moyen indispensable pour leur réelle mise en application sur le terrain. Dans leur volonté de bien faire, les cadres du MADR se doivent de réfléchir à se principe. On peut se féliciter à ce propos de la volonté de concertation exprimée par M Ferroukhi lors de sa récente rencontre avec l'UNPA.

Face à ce manque de vision stratégique de bon nombre de cadres, c'est aux producteurs les plus conscients à s'organiser. Parmi ces producteurs existent des agri-managers paysans ou issus des instituts agronomiques. Dans l'environnement des producteurs existent également des élites rurales : fonctionnaires à la retraite, diplômés sans emploi, élus d'associations locales, agents d'administrations locales, partisans du patriotisme économique. C'est à eux, en partenariat avec les producteurs, à imaginer des structures permettant la valorisation locale des produits agricoles afin de défendre les marges des producteurs et de créer une dynamique de circuit courts, voire de transformation seule à même de créer de l'emploi.

Ces dernières années, le développement de fêtes de la cerise, de l'abricot, du miel et d'autres productions spécifiques à un terroir démontre l'émergence des forces sociales existant dans les campagnes. A ces forces là de se fédérer afin de créer un nouveau rapport de force par rapport aux grossistes et transformateurs.


1Denis Pommier 2009 Relever le défi du développement agricole et rural. Options Méditerranéennes, B 64. Perspectives des politiques agricoles en Afrique du Nord. Ciheam.213-220.
2Voir nos précédents articles sur ce sujet.
3Denis Pommier Op. Cit.

mardi 4 août 2015

ALGERIE. GROGNE DES ELEVEURS LAITIERS, 1er TEST POUR FERROUKHI

LAIT

 
NEGOCIATION SUR LE LAIT : C'EST AUX LAITERIES DE FAIRE UN EFFORT.
Djamel BELAID 3.10.2015

Dans un article du 2.10.2015, le quotidien El-Watan titre « Les laiteries bloquent les négociations sur le lait.
Selon Leïla Beratto et Samir Amar-Khodja, auteurs de l'article, du côté des producteurs, on accuse les transformateurs : «Nous n’avons pas trouvé de solutions pour l’augmentation du prix du litre de lait. Le gouvernement veut que les transformateurs prennent en charge l’augmentation car ils font de gros bénéfices. Les transformateurs refusent. Nous sommes dans une impasse et nous avons demandé un rendez-vous pour la semaine prochaine, avec le Premier ministre Abdelmalek Sellal», rapporte Hassan Aït Mohand Saïd, président de l’Association des producteurs de lait de Batna.

Face à ce qui semble être un point de blocage et étant donné que les caisses de l'Etat sont vides, la solution pourrait venir des laits végétaux.
Un deal pourrait être proposé par les pouvoirs publics aux transformateurs sous la forme suivante. Pour la préparation de desserts (yaourts, flans, « danette », …) ainsi que certains laits diététiques, nous vous livrons du soja en remplacement de la poudre de lait. Comme le soja coûte moins cher, une partie des subventions auparavant allouées aux laiteries passent aux éleveurs.

Une telle solution passe par la mise en place rapide des proces de fabrication et les dosages nécessaire afin de suivre les habitudes alimentaires des consommateurs. Cependant, la solution est viable. Rappelons qu'à l'étranger des firmes come sojasun.fr et Bjorg.fr commercialisent des desserts à base de lait de soja et des laits végétaux à base de soja, de riz, d'avoine ou d'amandes.

L'Algérie dispose d'ingénieurs en technologie alimentaire et d'une industrie de transformation du lait. A eux de montrer de ce qu'ils sont capables. A eux de nouer des partenariats avec les firmes étrangères citées et aussi de mettre au point des préparations originales.

LE MADR AU PIED DU MUR
Sur le long terme, il s'agit de trouver des solutions afin de trouver de produire plus de fourrages. Certes, il y a l'irrigation mais également l'introduction de nouvelles espèces fourragères la mise à la disponibilité des agriculteurs de plus de matériel d'implantation et de récolte des fourrages.

Les solutions techniques sont pour la plupart connues des cadres techniques. Il s'agit de mettre ces cadres au plus près des producteurs. Pour cela, les solutions à développer sont de :
  • transférer des postes budgétaires de cadres en poste dans des bureaux pour les affecter à des associations d'éleveurs,
  • encourager la mise sur pied d'associations représentatives d'éleveurs et de groupements d'éleveurs pouvant telle la Coopsel de Sétif mettre un pied dans la vente du lait,
  • d'obliger les laiteries à mettre sur place des équipes d'appui technique en s'appuyant sur des expériences telles celles du projet Alban,
  • de financer des postes budgétaires des associations d'éleveurs et de groupements d'éleveurs en prélevant une taxe sur l'activité des laiteries.

Le secteur agricole et de la transformation est riche de potentialités humaine. Au MADR d'être le catalyseur afin de réunir le diagnostic le plus pertinent au sein de la filière et de dégager des actions permettant aux éleveurs d'être les propres agents de leur dévelopement au lieu d'en faire d'éternels asssités.

LES ELEVEURS AU PIED DU MUR
De leur côté si les associations d'éleveurs ont fait preuve de beaucoup de maturité, il est de leur devoir de pousser leur adhérents à former des groupes de producteurs afin d'obtenir un minimum d'aide financière et de postes budgétaires publics. Car, au final, c'est aux éleveurs organisés en réelles coopératives de services de se doter des moyens de produire plus de fourrages, d'avoir les moyens de transport de ces fourrages mais également de progressivement intervenir dans la transformation du lait afin de garantir leurs marges.
A ce titre, l'expérience de la Coopsel de Sétif mérite toute leur attention.

A eux de se dire que les ministres de l'agriculture passent (parfois très vite) et qu'eux seuls restent sur le terrain et que le salut ne viendra que de leurs propres initiatives.

DES PISTES A CREUSER POUR LE MADR
Le choix de développer l'élevage laitier en Algérie permet de réduire les importations de lait en poudre, crée de l'emploi rural et constitue une source d'ammendements organiques irremplaçables. Les difficultés actuelles proviennent de la nouveauté de cette activité pour certains éleveurs et chômeurs sans terre reconvertis dans l'élevage ainsi que d'une faiblesse actuelle de la production de fourrages.
Si la situation est préoccupante, elle n'est pas sans issue ; à conditions qu'une politique juste et volontariste soit mise n œuvre.

La réussite des politiques de développement économique nécessitent une innovation technique, managériale et juridique. En Algérie, trop souvent ces politiques sont restées dans les sentiers battus. Sans tomber dans le libéralisme on peut se demander s'il ne faut pas un Emmanuel Macron pour notre agriculture ?
Il s'agit ici moins d'investissements nouveaux que de rédéploiement et de valorisation de moyens existants.
En effet, certaines positions acquises gênent le développement de l'élevage : main-mise des meuniers sur le son, tarifs vétérinaires, marges des laiteries.

Pour le MADR comme pour tout ministère les moyens sont limités de même que le pouvoir d'action. Aussi s'agit-il de savoir sur « quels boutons appuyer » afin d'arriver au maximum d'efficacité.
Ces pistes de recherche sont également des idées à développer, en les adaptant, pour des laiteries, des éleveurs ou investisseurs.

Il s'agit avant tout de trouver rapidement des solutions à la situation intenable des éleveurs laitiers. Pour cela les points de blocage doivent être identifiés sachant que des résultats peuvent être obtenus à court, moyen ou long terme.
C'est aux cadres de la filière lait de les identifier et de les classer. Pour notre part, en tant qu'observateur, nous soulevons les points que nous avons identifier. Cette liste n'est donc pas exhaustive.

A-Diminuer les dépenses des éleveurs (hors poste alimentation)
-poste frais vétérinaires :
Constats : Il existe de maladies liées à l'hygiène (mammite, tiques, boiteries...) et à une mauvaise conduite d'élevage (non tarissement de vaches gestantes d'où des cas de fièvre vitulaire). Les vétérinaires ont des prix de prestations élevées.
---autoriser les techniciens vétérinaires à réaliser certains actes simples (souvent fait par les vétérinaires à des prix exorbitant) tels les vaccinations, les inséminations artificielles ainsi qu'une liste d'actes à définir au niveau des concernés.
-poste frais reproduction
Constat : intervalle vêlage, coût taureau, détection chaleur,
---voir avec le Ceniaag les améliorations possibles : démocratiser l'usage des paillettes
---de nouveaux droits pour les techniciens ?

A'-Renforcer le niveau technique des éleveurs.
Constat : le niveau technique des éleveurs est bas. Des pertes considérables ont lieu à cause d'une ignorance de principes basiques d'élevage.
-décider d'un diplôme de base OBLIGATOIRE pour tout éleveur (connaissances minimes sur l'alimentation, l'hygiène, les soins la conservation du lait, les groupements de producteurs),
-utiliser TOUS les moyens disponibles (chambres d'agriculture, laiteries, DSA, université,...) afin de faire passer ces stages de formation de quelques jours permettant la délivrance d'une carte d'éleveur.
-l'université a un grand rôle à jouer dans ces formations que beaucoup d'enseignants d'agronomie et de biologie pourraient dispenser.

B-utiliser les organismes économiques publics

La puissance publique possède une force d'intervention économique avec des offices tels l'ONAB ou PMAT. Autant l'utiliser. Cela n'empêche pas également des partenariats avec le secteur privé.
-Avec par exemple l'ONAB pour développer de :
---nouveaux produits de consommation: laits végétaux (lait de soja, d'avoine, de riz ou d'amande).
---nouveaux aliments du bétail : aliment engraissement pour veau enrichi en urée
---blocs multi-nutritionnels

-Avec PMAT et privé (concessionnaires)
---importation, montage ou fabrication de semoirs pour Semis Direct (rappel, cette technique permet une implantation rapide des fourrages pour un coût réduit).

C-redéploiement des moyens humains du MADR
Constat : il est plus facile de gérer des postes budgétaires que la spéculation sur les issues de meuneries tel le son.
---pour 2 départ à la retraite, affecter un poste budgétaire à une association ou groupement d'éleveurs (pour des périodes renouvelables de deux ans).
---trouver les moyens pour des fonctionnaires en CDD (jeunes)

D-utilisation des moyens du MADR
Constat : problème de vulgarisation de techniques nouvelles voir (avec INVA)
---spot TV sur l'hygiène de la traite, désinfection du trayon
---spot semis direct de l'orge, technique de l'enrubannage, utilisation de nouveaux fourrages tel le colza fourrager,
---spot semis direct de l'avoine
---spot utilisation urée chez ovins (réduire pression sur orge pour VL)
---revoir totalement les sites internet des instituts techniques du MADR (plus de vulgarisation)
---spot groupement de producteurs (coopsel Sétif) avantages : protéction des marges, exonération sur les bénéfices.

Constat : manque de semences d'avoine, manque structurel de fourrages
---avec ITGC élaboration d'un plan d'action pour produire plus de semences d'avoine, pour vulgariser l'emploi du semis-direct sans labour pour implanter des fourrages (vesce-avoine mais également sur-semis des jachères pâturées).
---étudier l'expérience de laiterie Soummam dans la région de Constantine concernant la récolte de fourrages par enrubannage.

E-utilisation de la puissance publique
Constat : recherche-développement peu développée
---contrat de recherche avec les universités : lait végétaux, enrichissement du son en urée
---utilisation des amphithéâtres et des enseignants pour une formation de base obligatoire pour tout éleveur (quelques jours).

F-Législation
---autoriser les groupements de producteurs à ouvrir des points de vente au détail de lait, étudier les moyens pour leur faciliter l'abatage et la vente viande de veaux.
---autoriser les actes d'Insémination Artificielle par les techniciens d'élevage et les techniciens vétérinaires.
---autoriser l'affectation à des groupements de producteurs des subventions publiques pour écraser au niveau de petits moulins du grain et vendre de la farine et de la semoule. Actuellement les meuneries ont le monopole. Buts : Réduire le monopole de la meunerie sur le son et la spéculation qui s'en suit. Améliorer les marges des céréaliers. Il est regrettable que la plus-value de la transformation des céréales produite par des agriculteurs aille uniquement à des citadins.
---prévoir le prélèvement d'un pourcentage minime sur les subventions allouées aux laiteries pour la création de postes budgétaires destinés à l'appui technique aux éleveurs. Il ne s'agit pas là de créer à nouveau des postes de fonctionnaires. Bien au contraire, il s'agit de créer un service d'appui tel qu'il existe à l'étranger avec les EDE (Etablissement Départemental de l'Elevage, contrôle laitier, …). Le recrutement devant être effectué par des élus paysans pour des contrats bi-annuels renouvelables.


G-partenariats avec autres ministères
-MERS :
---recherche : la recherche agronomique et agro-alimentaire doit être, en partie, orientée vers les problèmes de l'heure (production de fourrages, valorisation des aliments pour bétail et des sous-produits, développement de nouveaux aliments). A ce propos la recherche agronomique locale a permis de préciser les moyens d'enrichir la paille et l'orge avec de l'urée. Il serait intéressant de vulgarisr ces résultats mais de voir comment valoriser le son (peut-on l'enrichir partiellement avec de l'urée?).
---formation : les amphithéâtres de l'université doivent également recevoir les agriculteurs pour des formations de base, des remises à niveau. Il en est de même pour le personnel d'encadrement du MADR.

-MDN :
---matériel agricole (recherche-développement avec les ateliers de mécanique de l'armée telle la Base logistique de Blida). Il nous semble que la production locale de semoirs pour semis direct et de tout matériel concourant à la production de fourrage est à envisager. Cette coopération pourrait permettre la mise au point de prototypes que des entreprises locales pourraient ensuite fabriquer en série).
---poursuite de l'interdiction du pâturage des moutons le long des frontières afin de lutter contre la contrebande.

H-Partenariat avec le secteur privé national ou étranger
-Avec laiteries :
---étude et élargissement des expériences des laiteries Soummam (enrubannage à Constantine), appui technique aux éleveurs par Danone.
---développement des groupes d'appui techniques (Gaspels),
---étude sur la faisabilité de la production de laits végétaux, desserts (type « Danette » au lait de soja, yaourt au lait de soja).
-Avec les chambres d'Agriculture et coopératives étrangères
---recruter des chefs d'étables étrangers pour des séjours de quelques mois pour des actions de vulgarisation.
---développer des actions d'appui technique tel le projet Alban.
-Avec les ex-pays de l'Est.
---les importations de jeunes bovins depuis ces pays coûtent beaucoup moins cher que ceux provenant de France ou d'Espagne.

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GROGNE DES ELEVEURS LAITIERS, 1ER TEST POUR FERROUKHI
djam.bel@voila.fr 4.08.2015
Le mouvement revendicatif des éleveurs laitiers se poursuit et se structure. Ces éleveurs demandent une revalorisation des subventions publiques et ont l’intention de rencontrer le Ministre de l’agriculture. Ils ont prévu un sit-in le 20 aout devant le Ministère à Alger. Fait nouveau, la coordination inter-wilayas des éleveurs qui vient juste d’être créée dénonce dans un communiqué « l’exploitation des paysans par l’industrie de la transformation et le commerce de fourrages et des intrants de l’alimentation du bétail ». On peut se demander quelles solutions apporter et comment va réagir le nouveau Ministre de l’Agriculture, Sid-Ahmed Ferroukhi..

PROTEGER LES MARGES DES ELEVEURS
Lors de leur dernière réunion, les représentants de différentes wilayas se sont constitués en collectif. La dénonciation de «l’exploitation des paysans par l’industrie de la transformation » est signe d’une maturité dans l’analyse qu’ils font de la situation de la filière lait. Auparavant, les éleveurs réclamaient principalement un relèvement des subventions versées par les pouvoirs publics.
La situation des éleveurs est particulière. Dans un pays affecté une bonne partie de l’année par la sécheresse, élever des vaches laitières, grandes consommatrices d’herbe verte, reste une gageure. Pourtant, ils tentent de relever le défi. Le problème se complique car qu’un bon nombre d’éleveurs sont en hors-sol1 et sont pénalisés par l’augmentation des prix des fourrages et de l’aliment du bétail.
Augmenter les subventions publiques aux éleveurs risquerait de se traduire par un relèvement des prix du poste alimentation souvent aux mains de nombreux intermédiaires. Par ailleurs, avec la baisse de la rente gazière, les disponibilités allouées au secteur agricole seront tôt ou tard en baiss.
Pour le MADR, la solution ne peut donc pas consister à ouvrir plus grand le robinet des subventions. Reste la solution de protéger les marges des éleveurs. Marges mises à mal autant par l’amont que l’aval. En amont, les éleveurs doivent tenir compte des prix imposés par les vendeurs d’aliments. En aval, les transformateurs prospèrent notamment en transformant le lait en yaourt et fromage.

PROTECTION DES MARGES, MODE D’EMPLOI
Protéger les marges des éleveurs passe avant tout par la constitution de groupements d’éleveurs. Seuls de tels groupements peuvent permettre de faire reculer les appétits démesurés des intervenants en amont et aval de la filière.
C’est aux éleveurs à s’organiser. La balle est dans leur camp. Par contre, ils peuvent demander au MADR, des mesures juridiques, fiscales et financières – postes budgétaires, par exemple – afin de créer un environnement propice au développement de tels groupements. Déjà certaines dispositions juridiques existent localement. Il devient urgent de les compléter et de les faire conaître aux éleveurs.
Avec l’adhésion à venir de l’Algérie à l’OMC, seule la loi du marché devra s’appliquer. Toute forme de subvention aux producteurs sera interdite. En Algérie, les groupements de producteurs sont quasi inexistant alors qu’en France ou en Nouvelle-Zélande ceux-ci possèdent plus de cinquante ans d’expérience. Après une phase de fusion ces groupements ont donné naissance à des géants qui dorénavant s’internationalisent. Il est consternant que les décideurs algériens du MADR restent muets sur cet aspect du développement agricole. Il existe pourtant localement la tradition de l’entraide, la touiza. Il est urgent de remettre au goût du jour ce concept.
A cet égard il est significatif que les éleveurs en colère se soient réunis à la « Coopérative » Agricole de Services de Draa Ben Khedda. En fait de coopérative, cette structure n’en porte que le nom comme beaucoup d’autres structures homologues2. Une authentique coopérative3 ou groupement de producteurs pourrait développer par exemple des activités de transformation du lait en produits fromagers. Ou encore développer la vente direct de viande rouge. Ces activités permettraient de s’affranchir en partie des intermédiaires qui en profitent au passage et ainsi récupèrent à leur compte les subventions étatiques. Sans un réel changement, une partie de la filière risque d’être condamnée. Or, l’activité laitière réduit le chômage et fait vivre de nombreuses familles.
Le problème est qu’en Algérie la notion de coopérative a été dévoyée. Une vraie coopérative n’est pas une antenne administrative d’un quelconque office. Il faut réconcilier les éleveurs avec la notion de groupement de producteurs et leur montrer que c’est à eux à investir dans l’aval. Pas facile quand on voit l’avance prise par des groupes privés tels Laiterie Soummam ou Danone Djurdjura.
Il s’agit donc là d’un levier à moyen terme sur lequel peut agir le Ministre en favorisant de tels groupements. Sinon, que lui reste-t-il comme moyen d’action?
Il pourrait affecter quelques postes budgétaires aux associations d’éleveurs afin que ceux-ci mettent sur pied leur propre structure d’appui technique, quitte à faire prélever une somme symbolique sur l’activité des laiteries pour financer ces créations de postes. L’appui technique est essentiel. Nombre d’éleveurs laitiers sont des chômeurs sans aucune connaissances technique sur l’élevage laitier d’animaux importés. Pourtant certaines mesures simples concernant l’alimentation en concentrés, en minéraux ou en eau, l’hygiène des étables permettraient de nettes augmentations de la production laitière.
Concernant le prix des fourrages et des aliments du bétail, là aussi les mesures permettant immédiatement de protéger les marges des éleveurs sont rares. La suppression de la TVA sur l’importation de maïs et de tourteau de soja a surtout profité aux intermédiaires fabricants d’aliments du bétail et peu aux éleveurs.
Reste la solution d’accorder des délais supplémentaires pour le remboursement des emprunts des éleveurs auprès de la banque agricole. Ou encore de créer un fonds spécial sécheresse alimenté par une taxe sur l’activité des transformateurs de lait. Ces derniers réalisent en effet de confortables marges sur le dos des éleveurs. A défaut de taxe supplémentaire, la solution pourrait être d’exiger des laiteries la généralisation de groupes d’appui technique aux éleveurs situés dans leur bassin d’approvisionnement. Celles-ci ont en effet tout intérêt à sécuriser et à augmenter leur approvisionnement local en lait. La Laiterie Soummam et le groupe Danone Djurdjura ont développé des actions dans ce sens là. Pour inciter les autres laiteries à suivre cette voie et à développer l’aide technique aux éleveurs, aux pouvoirs publics de réduire progressivement l’accès au lait en poudre importé et à favoriser l’utilisation de laits végétaux. Le lait de soja, de riz, d’avoine ou d’amandes peut remplacer totalement ou partiellement le lait consommé mais également s’y substituer totalement ou partiellement dans la fabrication de certains yaourts ou de desserts de type « Danette ». 

FERROUKHI, DES MARGES DE MANOEUVRE ETROITES
Face à la crise du secteur laitier, les marges de manœuvre du nouveau ministre de l’agriculture sont très étroites.
Le secteur laitier est marqué par un déficit structurel en fourrages que seules des mesures telles que la technique du semis direct4, l’attribution aux éleveurs de kit d’irrigation et l’acquisition par les agriculteurs de plus de moyens mécanique de récolte des fourrages peut permettre de combler. Par ailleurs, les éleveurs de montagne en hors-sol devraient pouvoir bénéficier prioritairement de concessions spécifiques en terre agricole.
Enfin, les mesures pour protéger en aval ou en amont les marges des éleveurs ne peuvent aboutir que sur le moyen terme. Raison de plus pour dès maintenant aider les éleveurs à se ré-approprier une partie de leurs marges en les aidant à se constituer en groupements d’éleveurs pour par exemple acquérir les moyens de transport pour s’approvisionner en foin directement dans les zones de production, produire une partie de leurs aliments du bétail mais également mettre sur pied de petites unités de fabrication de fromages voir de petites chaînes de production de yaourts et de desserts (type « danette »).
Jusque là les éleveurs ont fait montre d’une grande maturité. Il y a quelques semaines, afin d’alerter les pouvoirs publics, ils ont distribué gratuitement du lait dans les rues de Tizi-Ouzou. Jusqu’à quand pourront-ils faire preuve d’une telle maturité ? Lors de regroupements publics, comme celui projeté le 20 devant le siège du MADR à Alger, il suffirait d’une provocation de gens mal-intentionnés pour que la situation dégénère. De leur côté, les services de sécurité avec le professionnalisme qui est le leur, notamment avec la notion de « gestion démocratique des foules » chère au général-major Hamel, ont de tout temps su gérer avec respect les manifestations de rue.
La solution reste dans le dialogue. Les échos de la récente réunion entre le Ministre et l’UNPA montrent la capacité d’écoute de Mr Ferroukhi. Au Ministre de mettre cartes sur table avec les représentants des éleveurs, de parler le langage de la vérité et de définir ensemble les mesures urgentes et celles de moyen terme en fonction des capacités financières actuelles du pays.
Il s’agit de mettre sur la table des questions trop peu souvent abordées telles l’utilisation plus efficace des cadres agricoles qui peuplent les bureaux, la réflexion sur le développement de véritables groupements de producteurs pouvant par exemple être abrités dans un premier temps au sein de structures telles les « coopératives » de services ou les CCLS. A ce propos, le Ministre et ses conseillers doivent aller voir comment fonctionnent à l’étranger et, notamment en France, les groupements d’éleveurs5 et de céréaliers.
Immédiatement après sa prise de fonction, le Ministre a eu à s’intéresser au dossier de la labellisation des produits agricoles. La solution de la crise du secteur laitier passe, comme dans le cas de la labellisation, dans l’organisation des producteurs au sein de leur filière. A eux, en amont de créer des circuits courts permettant de mieux protéger leur marge.
Que ce soit dans le secteur de l’élevage, de la pomme de terre ou des céréales la fin de l’aisance financière liée à la rente gazière montre la nécessité du passage d’une politique de larges subventions publiques à une politique d’organisation des filières.
Aux pouvoirs publics d’exercer leur droit régalien pour une meilleure équité dans la répartition des marges au sein de ces différentes filières agricoles. Aux producteurs également d’imposer à la puissance publique la prise en compte des intérêts du plus grand nombre (producteurs et consommateurs). Faute de quoi, la situation risquerait vite de devenir ingérable.