mercredi 16 décembre 2015

LE HCDS, OUTIL POUR LE DEVELOPPEMENT RURAL DE LA STEPPE.

LE HCDS, OUTIL POUR LE DEVELOPPEMENT RURAL DE LA STEPPE.
Propositions pour remédier à l'urgence du développement de l'élevage.
Djamel BELAID 16.12.2015

Le HDCS a pour mission l'aide au développement de la steppe. Cet organisme présente un beau bilan : aménagement de point d'eau, reboisement, gestion des parcours, création d'aménagements hydraulique, vulgarisation de nouvelles techniques de culture. La demande des agro-pasteurs est immense. Dans ces conditions, certaines axes de travail sont à privilégier. Nous proposons quelques idées techniques adaptées au contexte particulier de la steppe. Celles-ci se veulent originales et hors des sentiers battus.

MULTIPLIER L'OFFRE LOCALE EN FOURRAGE
La demande locale en fourrage est grande. Elle est liée à l'élevage traditionnel ovin mais également au développement de petits ateliers laitiers. Face aux besoins exprimés, le HDCS a notamment entrepris de vulgariser le semis direct et la culture de la luzerne. Ses solutions sont à encourager ; d'autres sont à proposer.

Semis direct, une technique adaptée au milieu steppique pour produire de l'orge
Les essais d'introduction de semis direct réalisés par le HDCS se sont révélés positifs. Ils ont eu lieu dans des zones D'autres essais conduit par l'ITGC ont eu lieu dans la wilaya de M'Sila. Ces essais ont permis une hause du rendement en orge, en paille tout en réduisant les coûts de mécanisation. Cependant, le semis direct exige des semoirs spécifiques. En effet, en absence de labour est remplacé par l'action d'un semoir plus lourds que les semoirs conventionnels. Or, ces engins ne sont pas fabriqués localement. Il s'agirait donc d'en fabriquer en urgence. De tels engins sont une priorité. A ce titre leur production constitue « la mère des batailles ». Aussi, des mesures financières fortement incitatrices devraient être prises. La construction d'un prototype pourrait être confié à l'institiution militaire et en particulier aux ateliers mécanique de la base logistique de Blida.

Semis direct, une technique adaptée au milieu steppique pour produire des fourrages
En Algérie, la réalité est là : nous ne savons pas cultiver des fourrages. Cela vaut autant pour les agriculteurs, les cadres de terrain que les chercheurs en agronomie. Certes, des initiatives se font jour : développement du sorgho irrigué, de la luzerne ou de l'ensilage avec enrubannage. Cependant, il s'agit là à chaque fois de fourrages récoltés. Or, l'éleveur à besoin également de fourrages à pâturer. La preuve nous en est donnée avec la traditionnelle pratique de l'orge en vert ou « g'sil ». Or, la recherche agronomique locale a très peu proposé des solutions répondant aux attentes des éleveurs. Une des solution pourrait être d'utiliser le semis direct pour semer des fourrages à pâturer. Là encore, il s'agirait d'implanter sans labours ces fourrages derrière des précédents orge. Reste à trouver les espèces fourragères adaptées au milieu et pouvant s'implanter facilement. La solution serait de s'inspirer des expériences étrangères qui privilégient les mélanges d'espèces. Aux traditionnelles graminées et légumineuses fourragères pourraient être associées des crucifères. L'avantage de l'amélioration des jachères fourragères est de ne pas nécessiter un matériel de récolte souvent indisponible localement au niveau des petites exploitations.

Introduction de crucifères fourragères
Parmis les espèces fourragères à faire connaître, il en est une qui nous semble primordiale. Il s'agit du colza fourrager qui pourrait accompagner la pratique de « l'orge en vert ». Cette espèce est particulièrement intéressante du fait de ses nombreuses qualités. Elle s'implante très facilement même si le lit de semences est grossier. Elle peut être semée dès la fin août avec irrigation d'appoint ; les pluies automnales suffisent ensuite à sa croissance. Cette espèce a une croissance très rapide et ses feuilles sont riches en azote. Enfin, elle tolère les basses températures de novembre et peut donc être paturée durant plusieurs mois.
Le drame pour l'Algérie est que le choix en matière de production d'huile a privililégié l'importation d'huiles brutes raffinées localement. De ce fait, les agriculteurs sont peu familarisés avec le colza et notamment le colza fourrager. Il y a là une opportunité d'affaires pour tout importateur et multiplicateur de semences.

Epandage de boues résiduelles
De récentes recherches ont montré que l'épandage de boues résiduelles issues des stations d'épuration des eaux usées permettent de fertiliser des sols ne recevant que 250 mm de précipitations.

Développement des BMN
Une autre voie concerne les blocs multi-nutritionnels (BMN) ou feed-blocks. Il s'agit de valoriser des matières premières locales parfois issues de l'industrie agro-alimentaire. Ces matières sont parfois pauvres individuellement, mais assemblées, elles constituent un aliment basique pour les animaux. Leurs besoins d'entretien peuvent être ainsi couverts, notamment en cas de disette ou de hausse des prix de l'orge et des aliments concentrés importés. La recherche locale et celle menée au Maroc proposent différents compositions pour les BMN : issues de meunerie comme le son, rebus de dattes, grignons d'olives, mélasse issue de l'industrie sucrière, urée et … ciment ou chaux éteinte comme liant. Une fois le mélange réalisé, il suffit d'un appareil à parpaings pour constituer des blocs qui une fois secs peuvent être vendus et entreposés chez les éleveurs. Voir à ce propos en tapant sur google images « feed block + IFAD » cette extraordinaire photo d'un atelier semi-industriel de BMN.
Dès le début des années 2000 l'ITELV a réalisé des essais mais sans persévérer ; les agropasteurs ayant été surpris par la nouveauté de ce type de produits. Lorsque les importations nationales de maïs et soja pour la fabrication d'aliments de bétail, dont les volailles, sont de l'ordre de 1,4 milliards de dollars, la moindre des choses serait de persévérer dans cette voix. A ce sujet, il serait nécessaire d'intéresser des investisseurs privés locaux.
Il y a peu de temps, Mr Ferroukhi, ministre de l'agriculture a parlé dans une conférence de presse de développer des « blocs de son ». Parlait-il de ce résultat de la recherche agronomique locale ?

Encourager hydroponie et utilisation de l'urée
L'hydroponie consiste à cultiver durant sept jours de l'orge germé. Cette pratique se déroule en ambiance artificielle et nécessite peu de moyen. De nombreux éleveurs l'utilisent dans des garages. L'engouement est grand pour l'hydroponie. Si l'Itelv a mené quelques essais, peu de moyens sont consacrés à cette pratique qui semble boudée par la recherche agronomique locale. Or, cette technique peut être améliorée. On peut penser par exemple à y intéger de la fertigation afin d'améliorer le taux de matières azotées du fourrage produit. A noter que la germination permet de solubiliser le phosphore du grain qui se trouve sous forme de phytates et qui sous cette forme est inassimilable par les animaux. Ce type de recherche ne peut être conduit que par des chercheurs locaux ; les chercheurs européens n'étant pas intéressés.
Cette technique est primordiale pour les élevages en hors sol. En effet, l'orge étant majoritairement utilisée en matière d'engraissement des ovins, toute amélioration de son efficacité est primordiale.
Le même principe vaut pour l'utilisation de l'urée en mélange avec l'orge en grains. La recherche agronomique locale a montré qu'il est possible de donner aux ovins et bovins de l'urée à raison de 20 grammes pour 500 grammes d'orge concassée. L'urée est actuellement disponible dans un grand nombre d'exploitations puisqu'il s'agit en fait d'un engrais azoté produit par l'industrie locale. Mais, il n'y a jamais eu une campagne de vulgarisation sur les bienfaits de l'urée comme correctif azoté auprès des éleveurs ou des fabricants d'aliments du bétail.


HCDS, ENGAGER UNE DYNAMIQUE MANAGERIALE
Il ne faut pas se voiler la face, en matière de participation des agriculteurs et ruraux au développement agricole et rural nous ne savons pas faire en Algérie. Or, le développement agricole et rural ne peut se faire sans la participation des premiers concernés. En la matière, les choses ne sont pas aussi faciles que dans le domaine des innovations techniques.

Pour de réelles coopératives de services
De nombreux exemples étrangers ou des exemples locaux comme ceux de la Coopsel de Sétif montrent que des coopératives de services réellement prises en charge par leurs sociétaires sont capables d'un réel dynamisme. Comment susciter un tel essor sans que des intérêts particuliers ne dominent de telles structures ? Tel est l'enjeu actuel. Différents articles dans la revue « Alternatives Rurales » montrent qu'au Maghreb de véritables dynamiques existent localement. Aux décideurs patriotes locaux de savoir s'appuyer sur ces forces locales.

Tenir compte des élites rurales
Différentes analyses récentes, dont celle de Omar Bessaoud, montrent l'émergence d'élites rurales. Ce phénomène à différentes origines. Il est le résultat des politiques de formation, de chômage de diplômés qui recherchent à créer de l'emploi local, programmes de développement rural intégré, autorisation de création d'associations. Ce dynamisme transparait par exemple dans le développement de foires agricoles locales privilégiant des produits de terroirs.
A cela s'ajoute les financements publics pour des projets agricoles locaux et une nouvelle façon d'investir de l'argent de l'émigration. Souvent cet argent est allé dans des dépenses somptuaires, or de plus en plus certains émigrés investissent maintenant dans des projets économiques.

CONCLUSION
La recherche agronomique locale et une veille technologique montrent que certaines innovations techniques peuvent apporter un plus à l'activité agricole et au développement rural. C'est le cas par exemple avec l'utilisation de semoirs pour semis direct ou la fabrication de BMN. Connaissant l'effet du semis direct sur les rendements en zone semi-aride, on peut imaginer les augmentations possibles de la production fourragère steppique si la disponibilité en ce type d'engins était suffisante.

Actuellement dans la steppe, le HDCS est l'institiution qui dispose le plus d'expérience en matière de développement agricole et rural. En témoigne la constructions d'ouvrages pour l'épandage des crues, la mise en défens des parcours ou le développement de points d'eau. Il nous semble que cet organisme pourrait démultiplier son action en nouant des partenariats externes et en impulsant des initiatives privées et coopératives.

Par ailleurs, on peut noter l'absence de représentants des éleveurs dans les institutions locales en steppe. C'est le cas des structures de développement, de recherche et de formation agricole (Centres de formation professionnels mais également universités). Pourquoi ne pas instaurer la présence d'élus représentatifs d'agropasteurs dans les conseils d'administration de ces institutions ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire