LE
HCDS, OUTIL POUR LE DEVELOPPEMENT RURAL DE LA STEPPE.
Propositions
pour remédier à l'urgence du développement de l'élevage.
Djamel BELAID 16.12.2015
Le HDCS a pour mission l'aide au
développement de la steppe. Cet organisme présente un beau bilan :
aménagement de point d'eau, reboisement, gestion des parcours,
création d'aménagements hydraulique, vulgarisation de nouvelles
techniques de culture. La demande des agro-pasteurs est immense. Dans
ces conditions, certaines axes de travail sont à privilégier. Nous
proposons quelques idées techniques adaptées au contexte
particulier de la steppe. Celles-ci se veulent originales et hors des
sentiers battus.
MULTIPLIER
L'OFFRE LOCALE EN FOURRAGE
La demande locale en fourrage
est grande. Elle est liée à l'élevage traditionnel ovin mais
également au développement de petits ateliers laitiers. Face aux
besoins exprimés, le HDCS a notamment entrepris de vulgariser le
semis direct et la culture de la luzerne. Ses solutions sont à
encourager ; d'autres sont à proposer.
Semis
direct, une technique adaptée au milieu steppique pour produire de
l'orge
Les essais d'introduction de
semis direct réalisés par le HDCS se sont révélés positifs. Ils
ont eu lieu dans des zones D'autres essais conduit par l'ITGC ont eu
lieu dans la wilaya de M'Sila. Ces essais ont permis une hause du
rendement en orge, en paille tout en réduisant les coûts de
mécanisation. Cependant, le semis direct exige des semoirs
spécifiques. En effet, en absence de labour est remplacé par
l'action d'un semoir plus lourds que les semoirs conventionnels. Or,
ces engins ne sont pas fabriqués localement. Il s'agirait donc d'en
fabriquer en urgence. De tels engins sont une priorité. A ce titre
leur production constitue « la mère des batailles ».
Aussi, des mesures financières fortement incitatrices devraient être
prises. La construction d'un prototype pourrait être confié à
l'institiution militaire et en particulier aux ateliers mécanique de
la base logistique de Blida.
Semis
direct, une technique adaptée au milieu steppique pour produire des
fourrages
En Algérie, la réalité est
là : nous ne savons pas cultiver des fourrages. Cela vaut
autant pour les agriculteurs, les cadres de terrain que les
chercheurs en agronomie. Certes, des initiatives se font jour :
développement du sorgho irrigué, de la luzerne ou de l'ensilage
avec enrubannage. Cependant, il s'agit là à chaque fois de
fourrages récoltés. Or, l'éleveur à besoin également de
fourrages à pâturer. La preuve nous en est donnée avec la
traditionnelle pratique de l'orge en vert ou « g'sil ».
Or, la recherche agronomique locale a très peu proposé des
solutions répondant aux attentes des éleveurs. Une des solution
pourrait être d'utiliser le semis direct pour semer des fourrages à
pâturer. Là encore, il s'agirait d'implanter sans labours ces
fourrages derrière des précédents orge. Reste à trouver les
espèces fourragères adaptées au milieu et pouvant s'implanter
facilement. La solution serait de s'inspirer des expériences
étrangères qui privilégient les mélanges d'espèces. Aux
traditionnelles graminées et légumineuses fourragères pourraient
être associées des crucifères. L'avantage de l'amélioration des
jachères fourragères est de ne pas nécessiter un matériel de
récolte souvent indisponible localement au niveau des petites
exploitations.
Introduction
de crucifères fourragères
Parmis les espèces fourragères
à faire connaître, il en est une qui nous semble primordiale. Il
s'agit du colza fourrager qui pourrait accompagner la pratique de
« l'orge en vert ». Cette espèce est particulièrement
intéressante du fait de ses nombreuses qualités. Elle s'implante
très facilement même si le lit de semences est grossier. Elle peut
être semée dès la fin août avec irrigation d'appoint ; les
pluies automnales suffisent ensuite à sa croissance. Cette espèce a
une croissance très rapide et ses feuilles sont riches en azote.
Enfin, elle tolère les basses températures de novembre et peut donc
être paturée durant plusieurs mois.
Le drame pour l'Algérie est que
le choix en matière de production d'huile a privililégié
l'importation d'huiles brutes raffinées localement. De ce fait, les
agriculteurs sont peu familarisés avec le colza et notamment le
colza fourrager. Il y a là une opportunité d'affaires pour tout
importateur et multiplicateur de semences.
Epandage
de boues résiduelles
De récentes recherches ont
montré que l'épandage de boues résiduelles issues des stations
d'épuration des eaux usées permettent de fertiliser des sols ne
recevant que 250 mm de précipitations.
Développement
des BMN
Une autre voie concerne les
blocs multi-nutritionnels (BMN) ou feed-blocks. Il s'agit de
valoriser des matières premières locales parfois issues de
l'industrie agro-alimentaire. Ces matières sont parfois pauvres
individuellement, mais assemblées, elles constituent un aliment
basique pour les animaux. Leurs besoins d'entretien peuvent être
ainsi couverts, notamment en cas de disette ou de hausse des prix de
l'orge et des aliments concentrés importés. La recherche locale et
celle menée au Maroc proposent différents compositions pour les
BMN : issues de meunerie comme le son, rebus de dattes, grignons
d'olives, mélasse issue de l'industrie sucrière, urée et …
ciment ou chaux éteinte comme liant. Une fois le mélange réalisé,
il suffit d'un appareil à parpaings pour constituer des blocs qui
une fois secs peuvent être vendus et entreposés chez les éleveurs.
Voir à ce propos en tapant sur google images « feed block +
IFAD » cette extraordinaire photo d'un atelier semi-industriel
de BMN.
Dès le début des années 2000
l'ITELV a réalisé des essais mais sans persévérer ; les
agropasteurs ayant été surpris par la nouveauté de ce type de
produits. Lorsque les importations nationales de maïs et soja pour
la fabrication d'aliments de bétail, dont les volailles, sont de
l'ordre de 1,4 milliards de dollars, la moindre des choses serait de
persévérer dans cette voix. A ce sujet, il serait nécessaire
d'intéresser des investisseurs privés locaux.
Il y a peu de temps, Mr
Ferroukhi, ministre de l'agriculture a parlé dans une conférence de
presse de développer des « blocs de son ». Parlait-il de
ce résultat de la recherche agronomique locale ?
Encourager
hydroponie et utilisation de l'urée
L'hydroponie consiste à
cultiver durant sept jours de l'orge germé. Cette pratique se
déroule en ambiance artificielle et nécessite peu de moyen. De
nombreux éleveurs l'utilisent dans des garages. L'engouement est
grand pour l'hydroponie. Si l'Itelv a mené quelques essais, peu de
moyens sont consacrés à cette pratique qui semble boudée par la
recherche agronomique locale. Or, cette technique peut être
améliorée. On peut penser par exemple à y intéger de la
fertigation afin d'améliorer le taux de matières azotées du
fourrage produit. A noter que la germination permet de solubiliser le
phosphore du grain qui se trouve sous forme de phytates et qui sous
cette forme est inassimilable par les animaux. Ce type de recherche
ne peut être conduit que par des chercheurs locaux ; les
chercheurs européens n'étant pas intéressés.
Cette technique est primordiale
pour les élevages en hors sol. En effet, l'orge étant
majoritairement utilisée en matière d'engraissement des ovins,
toute amélioration de son efficacité est primordiale.
Le même principe vaut pour
l'utilisation de l'urée en mélange avec l'orge en grains. La
recherche agronomique locale a montré qu'il est possible de donner
aux ovins et bovins de l'urée à raison de 20 grammes pour 500
grammes d'orge concassée. L'urée est actuellement disponible dans
un grand nombre d'exploitations puisqu'il s'agit en fait d'un engrais
azoté produit par l'industrie locale. Mais, il n'y a jamais eu une
campagne de vulgarisation sur les bienfaits de l'urée comme
correctif azoté auprès des éleveurs ou des fabricants d'aliments
du bétail.
HCDS, ENGAGER UNE DYNAMIQUE
MANAGERIALE
Il ne faut pas se voiler la
face, en matière de participation des agriculteurs et ruraux au
développement agricole et rural nous ne savons pas faire en Algérie.
Or, le développement agricole et rural ne peut se faire sans la
participation des premiers concernés. En la matière, les choses ne
sont pas aussi faciles que dans le domaine des innovations
techniques.
Pour
de réelles coopératives de services
De nombreux exemples étrangers
ou des exemples locaux comme ceux de la Coopsel de Sétif montrent
que des coopératives de services réellement prises en charge par
leurs sociétaires sont capables d'un réel dynamisme. Comment
susciter un tel essor sans que des intérêts particuliers ne
dominent de telles structures ? Tel est l'enjeu actuel.
Différents articles dans la revue « Alternatives Rurales »
montrent qu'au Maghreb de véritables dynamiques existent localement.
Aux décideurs patriotes locaux de savoir s'appuyer sur ces forces
locales.
Tenir
compte des élites rurales
Différentes analyses récentes,
dont celle de Omar Bessaoud, montrent l'émergence d'élites rurales.
Ce phénomène à différentes origines. Il est le résultat des
politiques de formation, de chômage de diplômés qui recherchent à
créer de l'emploi local, programmes de développement rural intégré,
autorisation de création d'associations. Ce dynamisme transparait
par exemple dans le développement de foires agricoles locales
privilégiant des produits de terroirs.
A cela s'ajoute les financements
publics pour des projets agricoles locaux et une nouvelle façon
d'investir de l'argent de l'émigration. Souvent cet argent est allé
dans des dépenses somptuaires, or de plus en plus certains émigrés
investissent maintenant dans des projets économiques.
CONCLUSION
La recherche agronomique locale
et une veille technologique montrent que certaines innovations
techniques peuvent apporter un plus à l'activité agricole et au
développement rural. C'est le cas par exemple avec l'utilisation de
semoirs pour semis direct ou la fabrication de BMN. Connaissant
l'effet du semis direct sur les rendements en zone semi-aride, on
peut imaginer les augmentations possibles de la production fourragère
steppique si la disponibilité en ce type d'engins était suffisante.
Actuellement dans la steppe, le
HDCS est l'institiution qui dispose le plus d'expérience en matière
de développement agricole et rural. En témoigne la constructions
d'ouvrages pour l'épandage des crues, la mise en défens des
parcours ou le développement de points d'eau. Il nous semble que cet
organisme pourrait démultiplier son action en nouant des
partenariats externes et en impulsant des initiatives privées et
coopératives.
Par ailleurs, on peut noter
l'absence de représentants des éleveurs dans les institutions
locales en steppe. C'est le cas des structures de développement, de
recherche et de formation agricole (Centres de formation
professionnels mais également universités). Pourquoi ne pas
instaurer la présence d'élus représentatifs d'agropasteurs dans
les conseils d'administration de ces institutions ?
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