Abdelmalek Sahraoui,
grand exploitant agricole : « Nous sommes tournés vers
l’agriculture hyper-intensive »
lundi 7 décembre
2015 | Par Zahra Rahmouni TSA
Abdelmalek Sahraoui,
PDG de la Holding Promo Invest dont fait partie le groupe GGI Filaha
Issu d’une famille
d’agriculteurs, M. Sahraoui est à la tête d’un groupe leader
dans l’amont agricole en Algérie avec un total de 17 800 hectares
répartis dans les wilayas de Mascara, Saïda, Oran et Adrar. Son
groupe produit des raisins de table, des cerises et autres fruits
précoces, et l’huile d’olive. Ces produits sont commercialisés
sous la marque Slatna. Il produit aussi des semences de pomme de
terre, les céréales… Entretien.
L’Algérie peut-elle
devenir un pays exportateur de produits agricoles au même titre que
ses voisins marocains et tunisiens ?
Avant de viser
l’exportation, nous devons d’abord travailler pour répondre à
la demande du marché national. Les labels « légumes Algérie » «
fruits d’Algérie » ont une renommée internationale dont on doit
profiter davantage. Dans notre cas, nous avons une plateforme locale
avec une dimension à l’internationale.
Pour l’export, nous
allons cibler davantage l’Europe, la Russie, l’Amérique du Nord,
le Moyen Orient et l’Extrême Orient, car ce sont des marchés
porteurs dans le domaine des primeurs et des produits hors saison. À
cela s’ajoute le fort potentiel que représente nos produits du
terroir ainsi que les caractéristiques uniques de notre sol et de
notre climat. Nous avons un potentiel hydrique impressionnant dans
les hauts plateaux et dans le grand Sud à cela s’ajoute des
étendues qui n’ont jamais été travaillées donc non infectées
par les mauvaises pratiques et les traitements nocifs et les maladies
transmissibles . Ces atouts nous permettront de prendre une avancée
sur nos voisins tunisiens et marocains.
Parlez-nous du projet
de la ferme agricole pilote dans la wilaya d’Adrar et celui de
Saïda pour lequel vous avez le soutien technique du groupe américain
AGCO ?
Le projet de Mgiden à
Timimoune a été lancé le 25 juillet dernier avant même la
signature du cahier des charges. Il concerne les cultures fourragères
et les grandes cultures avec des prévisions de production de plus de
60 000 tonnes par an, avec l’intégration de l’élevage de 2 000
vaches laitières pour la production du lait cru.
Pour l’arboriculture,
on envisage la production de plus de 74 000 tonnes/an tous produits
confondus (agrumes, amande, raisin de table précoce). Tandis que
pour la semence de pomme de terre on prévoit une production de plus
de 35 000 T/an avec un rendement qui doit dépasser les 70 t/hectare
pour les deux variétés spunta et condor. Ce projet, en mode
concession, s’inscrit dans la démarche des pouvoirs publics en
application du programme du président de la République Abdelaziz
Bouteflika de relever le défi qui est celui d’atteindre deux
millions d’hectares en irrigués à l’horizon 2019.
En plus de la ferme
pilote de Timimoune, nous avons également le projet de Saïda qui
s’étend sur 2200 hectares qui sera achevé durant le 1er trimestre
2016. Nous comptons étendre ce projet à 10 000 ha pour alimenter
notre usine de trituration d’olive qui se trouve en plein champ
d’oléiculture avec une capacité de production de 20 000
tonnes/an.
La trituration des
premiers lots d’olives a commencé le 27 novembre dernier. Notre
partenaire Americain AGCO nous a fourni les techniques de gestion par
satellite ainsi que le matériel adéquat à la réussite de nos
projets d’investissement. Nous nous félicitions d’avoir réussi
à maîtriser ces techniques de pointe avec un personnel
exclusivement algérien. Ce sont des techniques de mise en valeur des
terres agricoles, de plantation arboricole, de semis direct des
céréales, de traitement et de l’irrigation et de la gestion
intelligente de nos exploitations.
De quelles manières,
les Américains apportent-ils leur soutien sur le projet d’Adrar ?
Il y a eu effectivement
un transfert technologique qui va nous permettre de concrétiser nos
projets et notamment celui de Timimoune. Ce partenariat consiste à
transférer les dernières techniques de gestion intelligente avec
l’utilisation de GPS pour l’irrigation avec notre partenaire
Americain de AGCO et de Valley irrigation.
Nous avons donc opté
pour l’irrigation d’appoint en continue avec des pivots frontaux,
qui est la plus récente technologie pour la gestion efficiente de
nos ressources hydriques. Il faut protéger ces richesses. La
technique utilisée permettra d’éviter l’évaporation et la
perméabilité en même temps avec une pluviométrie contrôlée par
satellite.
On s’est imposé avec
nos partenaires par notre engagement envers eux pour relever ce défi
et on va continuer à le faire.
Les États-Unis sont
tournés vers l’agriculture intensive, souhaitez-vous importer le
même modèle en Algérie ?
Les États-Unis sont
dans un modèle d’agriculture hyper-intensive. Cela fait plus de
cinq ans que nous nous sommes tournés vers ce type d’agriculture,
avant même de travailler avec les Américains. Les rendements sont
très élevés. La culture hyper-intensive va nous permettre
d’utiliser notamment la mécanisation.
Par exemple, dans le
domaine de l’oléiculture, nous développons en ce moment la
culture de la variété « Chemlal », qui est d’origine
algérienne. Nous travaillons sur la conduite des Chemlal, du
greffage jusqu’aux plantations en allant vers la taille et la
cueillette. La mécanisation favorise ce type de culture hyper
intensive. Le partenariat noué avec les Américains n’est pas un
partenariat direct avec une prise de participation. Notre démarche
se tourne davantage vers un partage en matière de recherche et de
développement, un transfert technologique et des conseils.
On sait qu’il y a une
utilisation des OGM aux États-Unis. Est-ce que cela fera partie du
savoir-faire transmis par les Américains ?
Non, c’est exclu. On
veut exporter vers l’Europe et la Russie donc cela ne fait pas
partie de notre démarche de travail.
Existe-t-il d’autres
partenariats avec des sociétés étrangères ?
Oui, nous avons des
partenariats très avancés avec un groupement italien qui fournit
près de 70% des portes greffe à toute l’Europe et la Turquie.
Nous avons aussi des partenariats avancés avec les Espagnols dans le
domaine de l’arboriculture et l’oléiculture.
Récemment, nous étions
en Angleterre pour le développement d’un partenariat dans la
production de pommes de terre et de semences. Enfin, il existe aussi
un projet de partenariat avec les Australiens pour la production de
pommes de terre in vitro et qui permettrait d’ici quatre à cinq
ans d’arrêter l’importation de semences de pomme de terre et
éviter ainsi à l’Algérie d’avoir des risques de contamination
importée.
Des partenariats avec
des Français existent aussi, dans le Conseil. En fait, nous
considérons que nous n’avons pas besoin de prise de participation,
nous sommes contre ce principe. Nous avons donc imposé notre logique
de partenariats car nous maîtrisons la technique et la conduite des
cultures. Ces partenariats nous permettent d’avancer rapidement.
Par exemple, nous pourrons facilement dominer le modèle de travail
marocain avec cette dynamique de partenariat. Au Maroc, il n’existe
pas de grandes exploitations agricoles, le modèle de gestion
économique est différent.
En l’espace de trois
ans, nous pourrons déjà placer des produits algériens sur le
marché européen car nous avons déjà 20 ans d’expérience, notre
groupe a commencé à relever le défi en 1995 avec la politique de
reconversion des cultures et maintenant on profite de la stabilité
réglementaire grâce aux lois qui régissent le secteur. Ces
partenariats vont nous permettre d’accélérer le processus et
investir davantage dans des cultures agricoles qu’on maîtrise très
bien.
Vous privilégiez le
circuit de distribution directe pour la vente de vos produits en
Algérie…
Oui. Nous avons créé
une société qui va s’occuper de l’action marketing et de la
création d’une plateforme logistique pour la distribution en B to
C. C’est un « concept frais » que nous avons développé pour
avoir une valeur ajoutée et fidéliser le consommateur, afin que le
produit frais soit dans le réfrigérateur des consommateurs dans les
48 heures. Pour l’instant, les intermédiaires n’accordent pas
d’importance à la qualité du produit et à l’emballage
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