GHARDAIA,
LE MAÏS NE FAIT PLUS RECETTE.
Djamel
BELAID 1.10.2016
Selon
Ali Bendjoudi, directeur des services agricoles à Ghardaïa, la
récolte automnale de maïs devrait connaître une sensible baisse.
Les superficies emblavées n'ont en effet représentées que 900?ha
au lieu des 2 500 ha de l'an passé. La cause ? L'ONAB qui a du
mal à enlever les 8 000 qx produits par les agriculteurs locaux. Un
comble quand on sait que la facture des importations de produits pour
aliments du bétail (maïs et soja) tourne en moyenne autour de 1,4
milliards de DA.
LES
DIFFICULTES DU MADE IN DZ
Le
cas du maïs illustre les difficultés de bâtir une agriculture
nationale orientée vers la satisfaction des besoins des
consommateurs locaux.
Produire
du maïs dans le sud sous irrigation continue avec pivot est un bel
exploit des agriculteurs. Il faut dire que le maïs est une culture
pratiquement inconnue localement. A part quelques pieds servant de
mini brise-vent en maraîchage, le maïs était absent de nos champs.
Or,
voilà que dans une seule région, des agriculteurs arrivent à en
produire une quantité appréciable. Certes les quantités produites
ne sont qu'une goutte d'eau face aux actuelles importations. Mais,
cette production illustre le savoir-faire technique des investisseurs
nationaux.
MAÏS-GRAIN,
UN SAVOIR-FAIRE INCONTESTABLE
Les
agriculteurs produisant du maïs et les cadres techniques les
conseillant sont à féliciter. En effet, le maïs-grain produit
vient en deuxième culture après le blé ou l'orge. Cela est
possible grâce au choix de variétés à cycle court, au climat
chaud et aux disponibilités actuelles en eau.
L'efficacité
économique et agronomique de la rotation pourrait même être
améliorée en semant en culture dérobée du colza fourrager avant
le semis du blé. A cette fin, l'usage d'un semoir pour semis direct
s'avère fort utile afin de concilier vitesse de semis et maintien de
la matière organique du sol.
Le
seul inconvénient de la production de maïs-grain vient de la forte
demande en eau nécessaire à ce type de production. Or, l'eau des
nappes phréatiques se renouvelle pas ou à un rythme nettement
inférieur aux prélèvements. Par ailleurs, selon les nappes
phréatiques, l'eau d'irrigation est plus ou moins chargée en sel.
Aussi, au fur des campagnes d'irrigation, les sols deviennent saturés
en sel. En effet, du fait de la faiblesse de la pluviométrie locale,
on ne peut compter sur un lessivage naturel du sel par les pluies.
FELLAHINE,
FAITES ENTENDRE VOTRE VOIX
Mais
paradoxalement, cette production de maïs et le regrettable
désengagement de l'ONAB illustrent le faible poids politique des
paysans algériens. En effet, sous d'autres cieux, el-fellahines sont
organisées en coopératives paysannes libres. Il ne s'agit pas comme
chez nous de ces dépôts CCLS de l'OAIC dénommés abusivement
« Coopératives » où les sociétaires n'ont pas voix au
chapitre face à un directeur nommé par la tutelle depuis la
capitale. Sous d'autres cieux, ce sont les coopératives qui
organisent la collecte du maïs et le commercialise ou le transforme.
A charge pour elles de préciser aux pouvoirs publics les quantités
livrées et donc payées aux agriculteurs. Ces pouvoirs publics
adressant alors aux-dits agriculteurs le montant des subventions
allouées à la culture.
L'INCAPACITE
DE L'ONAB
A
ce schéma où les agriculteurs sont organisés librement en entités
économiques viables et dynamiques, les nos pouvoirs publics ont
préférés des offices publics. Or, dans le cas présent l'ONAB
montre son incapacité à stimuler la production locale de matière
première pour aliment du bétail. Cet office et l'OAIC sont plus à
l'aise pour installer des suceuses à grains sur les quais de nos
ports ou importer à tour de bras des grains achetés en devises à
des agriculteurs étrangers.
Si
un tel schéma pouvait se concevoir aux premières années de
l'indépendance, à l'heure de la réduction de la rente pétrolière,
de l'émergence d'une paysannerie dynamique et d'élites rurales, il
semble temps de fluidifier le commerce du grain.
Certes,
les enjeux sont grands. On touche là au secteur de l'alimentation.
Or, qui dit réforme de l'outil public dit appétits démesurés de
certains opérateurs privés et copinages répréhensibles.
UN
CHANTIER POUR LE NOUVEAU MINISTRE DE L'AGRICULTURE
Il
y a là un chantier pour le nouveau ministre de l'agriculture.
Techniciens de terrain, directeurs des services agricoles, élus et
walis doivent exiger à leur autorité de tutelle un examen critique
de la situation. L'organisation du commerce du maïs concernant le
Sud ne peut se satisfaire de schémas bureaucratiques. Plus
qu'ailleurs, dans le Sud, les distances pénalisent le geste
économique. Surtout lorsque celui-ci a à pâtir de la bureaucratie.
Aussi, sans céder aux sirènes de l'ultra-libéralisme, il est
nécessaire d'imaginer un nouveau type d'organisation du marché du
maïs-grain. Celui-ci ne peut plus être du seul ressort de l'ONAB,
du moins au Sud du pays.
Actuellement,
l'ONAB n'arrivant pas à enlever le maïs produit par les
agriculteurs, pourquoi donc ne pas déléguer à ces producteurs la
possibilité de valoriser leur production. Pour cela, il s'agit
d'encourager la création d'unités locales de fabrication d'aliments
du bétail. Certes, les marchés les plus importants se situent au
Nord. Mais une demande existe au Sud. Si les producteurs locaux de
maïs-grain pouvaient bénéficier des prix garantis et des aides à
la production d'aliments de bétail, nul doute qu'ils sauraient
progressivement réunir les conditions nécessaires afin de valoriser
leur production.
Or,
actuellement, le schéma dominant est celui des offices tout
puissants. Pourtant, sur le terrain, l'exemple du maïs de Ghardaïa
vient démontrer le contraire.
MAÏS,
SOJA, TRITICALE ET EAU
La
dépendance de l'Algérie pour l'alimentation des élevages avicoles
est forte. Afin de nourrir les animaux, d'autres moyens que la
production locale de maïs existe. Ce maïs importé peut être
partiellement remplacé par l'orge et encore plus par les triticales.
Or ces deux céréales ne réclament pas l'irrigation coûteuse
indispensable aux parcelles de maïs.
Par
ailleurs, la production de protéines animales revient cher en grains
et fourrages. Aussi, il devient indispensable d'élargir l'offre
locale en protéines végétales : lentilles, pois-chiche,
fèves, soja extrudé. Ce type de produits apporte dans la ration
alimentaire les mêmes acides aminés indispensables que les produits
carnés.
Une
réflexion portant sur le long terme est donc à envisager.
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