vendredi 7 août 2015

RAPPORT METBOUL POUR L'AGRICULTURE DZ, OUI MAIS...

PROSPECTIVE
RAPPORT METBOUL POUR L'AGRICULTURE DZ, OUI MAIS...
La presse poursuit la publication du Rapport sur l'économie algérienne remis par le Pr METBOUL à Mr Sellal. Ce rapport comprend plusieurs parties et se veut une contribution pour une relance économique en Algérie. Ce rapport comprend un volet concernant l'agro-industrie. Nous proposons une relecture critique.

Ce rapport a le grand mérite d'exister. Il faut à ce propos féliciter le Pr Metboul d'avoir réunit un comité d'experts afin de dégager des propositions d'action. Nous aurions cependant souhaité une participation plus large d'agro-économistes à la rédaction de la partie consacrée au secteur de l'agro-industrie.

D'emblée, les rédacteurs notent : « Nous devons donc avoir une approche holistique, le développement de la grande distribution dépend de l’agro-industrie qui dépend à son tour de l’agriculture qui ne pourra se développer sans un investissement dans le réseau hydrique conséquent ».

LES POINTS POSITIFS DU RAPPORT ET CE QUI MANQUE
Ce rapport comporte de nombreux points positifs. C'est le cas par exemple lorsqu'il note la fragilité du milieu semi-aride et la nécessité d'adopter les techniques les plus appropriées de travail du sol. C'est également le cas en prônant le développement de coopératives agricoles, de formation ou de la nécessité d'un observatoire.

Il nous semble que certains points de ce rapport mériteraient d'être enrichis des propositions faites lors de colloques qui se sont tenus en Algérie et par les propositions de différents agro-économistes algériens et étrangers reconnus pour leur maîtrise des questions de développement au Maghreb.

Dans ce rapport, il manque une analyse des actions entreprises localement par le MADR, une sorte de bilan d'étapes. Pour les décideurs il est important de trouver des réponses aux questions qu'ils ne manquent pas de se poser : « Où en sommes nous ? Pourquoi cela n'a pas marché ? Vers où nous ré-orienter ? ».
Ainsi, quand il est question de cluster, nulle trace d'une analyse des pôles agricoles locaux actuellement mis en place depuis quelques années sous l'égide du MADR. Les auteurs semblent ne pas savoir que cette démarche a été adoptée par les pouvoirs publics. Ils restent dans l'évocation de l'intérêt de telles structures en évoquant les clusters français d'Agen de Marmande ou de ceux de la Silicon Valley. On aurait aimé des propositions basées sur l'analyse de la situation de l'activité actuelle des pôles d'excellence déjà en place pour le lait, les céréales ou les pommes de terre.

Le rapport n'aborde pas la question de la protection des marges des producteurs, ni l'importance de consolider des filières ni le rôle des associations professionnelles et syndicats agricoles.
Enfin, rien sur les perspectives de l'accord d'association Algérie-UE où des cons équences d'une adhésion à l'OMC.

Concernant l'hydraulique on peut lire « la nappe albienne n’est pas encore exploitée par l’Algérie alors que la Libye et le Maroc s’y emploient déjà ». Rien n'est dit concernant l'utilisation durable de cette source ressource et des risques de salinisation des terres.

Par ailleurs, le dry-farming est jugé comme technique intéressante alors que chacun sait qu'elle constitue une des causes de la forte érosion des terres.

Concernant l'élevage, après quelques considérations générales, on peut lire : « Pour que ces éleveurs soient considérés comme des entités économiques, il faut que leur exploitation se compose d’au moins 20 bêtes ». L'idée est généreuse, mais comment procéder quand on sait que nombre d'éleveurs sont en hors-sol ou ne disposent pas de la surface de terre sufisante pour accéder à une autonomie fourragère ? Au delà des incantations, que proposer de concret aux cadres de terrain et aux DSA ?


Le rapport comprend par ailleurs quelques formulations malheureuses. Ainsi, on peut être étonné de lire que « le maraîchage et l’élevage sont délaissés par les agriculteurs ».
On peut également être étonné de lire que « Atteindre les objectifs de souveraineté alimentaire, de sécurité alimentaire, de développement rural, de préservation des emplois et de l’environnement, implique que l’Algérie y consacre enfin un budget ambitieux ». Chacun sait que ces dernières années des centaines de millions de dollars ont été consacrés au développement agricole.

CONCLUSION
A la lecture de ce rapport, c'est un sentiment de gène et d'insatisfaction qui saisit le lecteur au fur et à mesure des pages. A sa lecture l'impression qui domine est celle d'une analyse non approfondie.
Il nous semble qu'un tel rapport ne devrait pas être un simple catalogue de propositions. Il doit être également un descriptif d'actions prioritaires avec à chaque fois expliqué les conséquences et les implications attendues. A ce titre, ce rapport s'adressant à Décideurs de différents secteurs d'activités, il nous semble que sa rédaction devrait être plus pédagogique. Il est nécessaire d'indiquer les « tenants et aboutissements » espérés des mesures proposées et ce qui les motive. Ainsi, des propositions importantes ne doivent pas être noyées dans le flot d'exemples parfois anecdotiques.
Assez bien disposé en début de lecture de ce rapport du fait de la signature prestigieuse du Pr Metboul, nous avons vite dû déchanter par le ton généraliste et parfois superficiel de ce document. Nous avons eu parfois l'impression d'un mémoire rédigés par des étudiants de master alors que l'ambition première est de proposer une feuille de route pour M Sellal.

Il s'agit donc de le considérer comme un « premier jet » et de poursuivre sa rédaction quitte à élargir ses contributeurs et à nourrir la réflexion de la lecture de travaux antérieurs1. Travaux accessibles sur la toile et qui permettent de resituer le développement de l'agriculture algérienne dans le cadre plus large de la mondialisation.
1Nulle trace dans les propositions des deux auteurs d'une lecture d'économistes qui font autorité en la matière : A. Benachenou, O Bessaoud, S. Bedrani, Rastoin, … etc.

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