ALGERIE, BOUTERFA
CHAMPION DU SOLAIRE ?
Djamel Belaid 16.06.2016
J'ai toujours éprouvé
de la sympathie pour monsieur Bentarfa, cet ex-PDG de Sonelgaz. Cette
sympathie est née après avoir une conférence de monsieur
Benachenou. Conférence donnée dans le cadre des activités du
cercle de réflexion CARE. Pourquoi cette sympathie soudaine ?
Car Monsieur Bouterfa symbolisait alors ces cadres dynamiques soumis
au carcan pesant de l'administration. Ce PDG était alors sommé par
les pouvoirs publics de ne pas augmenter les tarifs de l'électricité
alors que la Sonelgaz doit faire face à un endettement colossal.
Mais, après avoir écouté ses déclarations de ces deux dernières
années à la Chaïne 3, cette sympathie a soudainement disparue. Non
pas qu'il veuille relever les tarifs de l'électricité - sur ce
point, il a raison. - mais pour sa vision technocratique. Voila que
depuis quelques jours, monsieur Bouterfa a été nommé Ministre de
l'énergie. Va-t-il enfin proposer de développer l'énergie solaire
dans un pays qui connait dans certaines régions 320 jours
d'ensoleillement ?
BOUTERFA, « KHATIKOUM»
En l'écoutant avant
qu'il ne soit nommé ministre, j'ai eu l'impression de l'entendre
dire au citoyen: les questions d'énergie « khatikoum» ,
qu'on me laisse jongler avec les milliards de $. Qu'on me laisse seul
décider des contrats passés pour Les centrales à gaz à de grandes
compagnies étrangères. A cette occasion, il m'a laissé
l'impression d'un Chakib Khelil qui au temps de sa splendeur décidait
de tout à la Sonatrach. Et quand ce n'était pas lui qui décidait,
c'était lella Arafat son épouse qui le faisait comme lors de la
rénovation du siège de la Sonatrach.
« Khatikoum ».
Certes, Mr Bouterfa, cet ex-haut cadre de l'Etat avait la
responsabilité de fournir de l'énergie aux différents secteurs
économiques et à la population. A ce titre son rôle a été
primordial et on ne peut que louer son travail. Que ce soit à la
Sonelgaz, ou dans les autres institutions, le pays a besoin de cadres
compétents qui oeuvrent dans l'intérêt de tous. Trop souvent
ignorés, il existe en Algérie des cadres et simples employés qui
oeuvrent avec abnégation. On ne saura jamais ce que chaque Algérien
doit aux cadres des différentes institutions spécialisées qui, ces
dernières années, ont oeuvré contre les prédateurs économiques
et notamment contre ceux qui souhaitaient le démantélement de la
Sonatrach.
UN LOBBY GAZIER EN
ALGERIE ?
Mais ce qui m'a gêné
en écoutant Monsieur Bouterfa simple PGD de Sonelgaz, c'est cette
sorte de mépris à propos de l'énergie solaire. Un peu comme le
lobby du nucléaire en France, Mr Bouterfa donne l'impression d'un
lobby gazier en Algérie. Nous disons cela non pas pour imaginer de
quelconques intérêts à passer de faramineux contrats avec des
entreprises étrangères, mais à cause de la vision technocratique
du dossier. Les choix énergétiques du pays ne devraient-ils pas
être discutés sur la place publique ou dans une tri-partie ou
une quadri-partie? Un peu comme à l'époque du Président Houari
Boumèdiène et de la Charte Nationale. Des débats démocratiques
avaient alors eu lieu dans les coins les plus reculés d'Algérie.
Et qu'on ne nous dise pas
que les citoyens ne se sentent pas concernés pas les questions liées
à l'énergie. A l'occasion de l'affaire du gaz de schiste, nos
concitoyens ont montré un haut niveau de conscience écologique.
Bien que le PDG de
Sonelgaz ait dit que le solaire pouvait contribuer à économiser nos
réserves de gaz, on a pu sentir de sa part une certaine morgue à
l'égard de ce type d'énergie. Lorsqu'il cite les capacités
solaires installées, celles-ci ne semblent être présentées que
comme un alibi. Un peu comme quelqu'un qui dirait : « circulez,
il n'y a rien à voir, on a déjà donné ».
Certes, qui veut compter
sur le solaire doit consacrer des sommes importantes. En témoigne la
centrale solaire de Ouarzazate construite par nos voisins marocains
avec des financements saoudiens. En effet, alimenter toute une ville
ou des industriels nécessite des centrales solaires de grande
taille. Il y a les panneaux voltaïques mais également d'autres
techniques consistant à chauffer un fluide pour faire tourner des
turbines même la nuit.
L'ERREUR D'ANALYSE DE
BOUTERFA
Vous lui trouvez des
excuses allez vous me dire. Non, ce n'est pas le cas. Mr Boutarfa
fait une erreur en oubliant le facteur humain. Expliquons nous.
Nous croyons au cercle
vertueux, à l'effet d'entrainement. Par exemple, la politique de
concessions agricoles permet des excédents de pomme de terre. Le
bénéfice tiré de ces cultures pousse des agriculteurs à
développer le machinisme pour semer ou récolter les tubercules. La
filière s'organise aussi en construisant chambres froides et
maintenant ateliers de conservation des pommes de terre.
Monsieur Bouterfa ne
prend pas assez en compte la satisfaction que pourrait ressentir le
citoyen qui ayant installé des panneaux solaires sur sa terrasse
pourrait devenir producteur d'électricité. C'est là une erreur
fondamentale de sa part.
Nous les conseillons
d'écouter les populations rurales en zone steppique à qui le HCDS a
fourni des panneaux solaires. Ils ne tarissent pas d'éloges pour
« es-souhoube » terme parfois utilisé pour désigné cet
organisme. Que Mr le Ministre jette un coup d'oeil aux conditions de
vie de ces Algériens : des hameaux perdus au milieu de la
steppe et des maisons en parpaings sans électricité et sans eau
courante.
On peut être étonné de
l'analyse du Ministre. Il reproche à l'énergie solaire de reposer
sur du matériel importé. Bouh comme dirait ma voisine. Zaama les
turbines de nos centrales à gaz sont toutes made in DZ ?
Vouloir produire
localement le matériel nécessaire au développement de l'énergie
solaire est incontestablement une bonne chose. Mais en attendant ce
jour là, rien n'empêche de démarrer avec du matériel importé.
LE SOLAIRE, CREER UN
CERCLE VERTUEUX
La politique de
concession de terre agricoles a constitué le début de ce cercle
vertueux. Concernant le solaire, il devrait être possible de créer
un tel effet d'entrainement. Pour cela quelques mesures concrètes
que nous soumettons aux spécialistes du secteur mais également à
nos concitoyens. Nous pensons en effet, que le consommateur a son mot
à dire. Et qu'instruit de la chose il peut alors faire pression sur
les décideurs.
-autoriser le secteur
privé à vendre de l'électricité à Sonelgaz en injectant du
courant dans le réseau ou en créant des réseaux dans les zones non
équipées.
-obliger Sonelgaz à
acheter l'électricité issu du solaire et produite par les citoyens
ayant des panneaux solaires sur leur terrasse.
TRICITI GHALYA? ET BEN
PRODUISONS NOTRE ELECTRICITE!
Il nous semble que ce
sont là deux mesures fondamentales. Le boom du solaire en France n'a
été possible que par le rachat à un bon prix par EDF de
l'électricité produite par les citoyens. En Allemagne, les sociétés
d'électricité rachètent la production excédentaire des panneaux
solaires des citoyens. La production d'électricité peut être
également à base d'éolien ou de biogaz (en utilisant la
méthanisation dans les Centres d'Enfouissement Technique par
exemple). Il serait intéressant d'étudier les expériences de
certains pays européens.
Faire produire de
l'électricité par les citoyens ne permettra pas de combler la
demande d'industries telles Fertial, El Hadjar ou la verrerie de Mr
Rebrab. Mais elle a plusieurs avantages:
-créer de l'emploi
(installateurs, constructeurs de panneaux et onduleurs, …),
-réduire la facture
d'électricité du citoyen; ce qui permettrait de compenser les
augmentations de tarifs de Sonelgaz.
-encourager la production
nationale de panneaux solaires et autres équipements.
En parallèle, le prix de
l'électricité doit être payé à sa juste valeur. Cela présente
plusieurs avantages:
-permettre à Sonelgaz
des moyens pour investir,
-rendre le consommateur
plus économe,
-faire rentrer dans les
caisses de l'Etat une partie des super profits réalisés par les
exportateurs (producteurs d'engrais, verreries, …) bénéficiant
d'une énergie sous-payée.
L'AUTONOMIE ENERGETIQUE
DE LA KABYLIE
Aux jeunes de la région
de Tizi-Ouzou trompés par la démagogie d'un Ferhat Mehenni, il y a
un challenge à leur proposer. Challenge qu'on peut également
proposer à d'autres jeunes : aller vers plus d'autonomie
énergétique de la Kabylie et des régions isolées.
Il y a là une œuvre
bénéfique à réaliser. Il s'agit de mobiliser des compétences et
des fonds privés afin d'équiper les habitations de panneaux
solaires, chauffe-eau solaires et autres équipements utilisant cette
énergie.
Qu'on ne nous dise pas
qu'il est impossible de progresser dans ce sens. Il y aujourd'hui en
Algérie des élites rurales parfaitement capables de réunir les
moyens matériels et humains afin de développer l'énergie solaire.
Développer l'emploi de l'énergie solaire ne pourra se faire que par
une mobilisation à la base en installant des panneaux et des
chauffes-eau solaires chez les particuliers et en faisant pression
sur les lobby technocrates qui ne rêvent que de méga projets.
Que les jeunes des
mosquées s'y mettent également. Mr Mokri et ces députés
islamistes qui ne font que s'en prendre à Mme Benghrebrit pourraient
faire preuve de plus d'utilité publique en oeuvrant pour le
développement de ce type d'énergie.
DES TERRORISTES TRES
ECOLOS
Actuellement, en Algérie,
ceux qui semblent utiliser le plus les panneaux solaires sont les
terroristes dans le maquis. Les communiqués du MDN mentionnent
souvent la découverte de panneaux à proximité de casemates. La
logique voudrait que dans un pays jouissant d'un excellent
ensoleillement, le citoyen ait les moyens d'installer des panneaux
solaires sur sa terrasse. Le pic de consommation le plus important se
situe durant les journées d'été à cause de l'utilisation massive
de climatiseurs. Le bon sens voudrait que ces climatiseurs soient
couplés au maximum avec des panneaux solaires.
Mr Bouterfa semble
dédaigner le solaire. Le voilà aujourd'hui Ministre, sa
responsabilité n'est que plus grande. Le dossier doit également
faire appel à d'autres investisseurs nationaux qui s'engageraient à
créer des fermes solaires. Le citoyen y a également sa place!
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