mercredi 3 août 2016

LES DESSOUS DE L'ASCENSION FULGURANTE DE L'INDUSTRIEL ISSAD REBRAB.

Les dessous de l'ascension fulgurante de l'industriel Issad Rebrab.

La première fortune du pays a disposé d'un compte offshore au début des années 199à, à l'époque où la loi algérienne l'interdisait.
Le Monde 27.7.2016 Lyas Hallas.

Le patron du groupe Cevital, I Rebrab, compte parmi les plus anciens clients du cabinet d'avocats panaméen Mossack Fonseca, mis en cause dans le scandale des « Panama Papers ». En juin 1992, alors que le pays s'enfonçait dans la tourmente de la « décennie noire » entre Etat et terroristes djihadistes, I Rebrab, alors importateur de ronds à béton, a recouru au service de M Fonseca pour créer une société offshore, Dicoma Entreprise Ltd. L'entreprise, domiciliée aux îles Vierges Britaniques devait gérer un portefeuille placé chez l'Union des banques suisses (UBS) à Genève. A l'époque, Rbrab n'avait pas d'activités à l'étranger. La loi algérienne interdit la possession à l'étranger d'avoirs issus d'une activité en Algérie.

Selon les documents obtenus par le Consortium International des journalistes d'investigations et le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, I Rebrab restera l'ayant droit de cette société au capital de 50 000 dollars jusqu'au mois de mars 1996, date à laquelle elle sera dissoute à sa demande. « Je soussigné, M. Issad Rebrab, actionnaire unique de la société Dicoma Enterprise Ltd, vous prie de bien vouloir procéder à la liquidation de cette dernière, après paiement des frais », a recommandé M. Rebrab dans un courrier adressé en date du 15 décembre 1995à l'antenne genevoise de Mossack Fonseca.
En fait, le cabinet panaméen a transféré les activités, - en particulier
la gestion du compte à l'UBS – de la société dissoute à une autre structure offshore, Anilson Management Ltd, domiciliée dans un autre paradis fiscal, l'île de Niue, dans le Pacifique sud.
Contacté par son secrétariat et directement au téléphone, Issad R n'a pas souhaité commenté l'information. Jointe par tél, sa chargée de communication, Soraya Djermoune, a nié l'existence de cette société : « M. R vous dit qu'il n'a jamais eu de société aux îles Vierges britanniques. »

Activité d'import-export
Première fortune d'Algérie, I R est à la tête d'un groupe dont le chiffre d'affaires a dépassé3 milliards de $ (2,7 milliards €) en 2015. Les acquisitions qu'il a réalisées ces dernières années – les groupes français Oxxo et Brandt, l'usine espagnol d'aluminium Alas et les aciéries italiennes Lucchini – lui donnent une envergure résolument internationale.

Mais si Cevital, créé en 1998, est devenu ce qu'il est, c'est parce que le patron du groupe a bénéficié pendant très longtemps de monopoles sur les importations de produits de grande consommation. D'abord le rond à béton, puis le sucre et l'huile. C'est cette activité d'import-export qui a d'ailleurs alimenté ce compte suisse d'I. Rebrab, mis à jour dans les « PP ». L'argent provisionnant ce compte proviendrait de l'importation de ronds à béton d'Italie et de l'exportation de ronds à béton de l'usine Metal Sider vers le Maroc et de déchets ferreux vers la Russie.

C'est aussi ce flux d'argent qui a permis à M Rebrab de se lancer dans l'agro-alimentaire en France (Délice Mondial et Isla Mondial) où il s'est installé après le sabotage de l'usine Metal Sider d'Ouled Moussa par un groupe armé au milieu des années 1990. Et de financer les importations du sucre à son retour en Algérie, en 1993.

En 1991, la SACE, organisme italien de couverture des exportations, a mis à disposition de l'Algérie un crédit de 300 millions $pour l'exportation de ronds à béton italiens vers l'Algérie, que le gouvernement Hamrouche avait répartis sur cinq banques. Metal Sider a obtenu deux quotas pour 100 millions $. Les autres quotas ont bénéficié aux entreprises publiques SNS (60 millions) et Cosider, ainsi qu'un privé Koninef.

Une polémique avait éclaté à l'époque, lorsque les responsables de la SNS avaient accusés M. R qui achetait moins cher par le biais d'un trader algérien installé en Italie dont la société s'appelle Prodeco, d'importer en fait de l'acier ukrainien irradié transitant par la Péninsule. Parallèlement, Metal Sider a effectué des opérations d'exportation de ronds à béton vers Sonasid au Maroc, en 1993. Les opérations de commerce extérieur de M. Rebrab ne se limitaient néanmoins pas aux ronds à béton, à cette époque-là. Au prétexte de transformer en ronds à béton, il achetait d'importantes quantités de déchets ferreux. Puisque les quantités drainées dépassaient les capacités de l'usine, une bonne partie de ces déchets était exportée, malgré un arrêté interministériel de 1992, interdisant ce type d'exportations.

M.Rebrab s'est trouvé en situation de monopole pour la récupération de ces déchets comme pour leurs exportations, car il bénéficiait d'une dérogation. L'arrêté a été abrogé début 1994. Entre-temps, IR a eu le temps de décoller, et de gêner ceux, qui au sein du pouvoir, lui ont donné d'indispensables coups de pouce.

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