samedi 3 octobre 2015

AUTOSUFFISANCE EN BLE DUR : LES INCOHERENCES DE L’OAIC

AUTOSUFFISANCE EN BLE DUR : LES INCOHERENCES DE L’OAIC
Djamel BELAID 3.10. 2015
djam.bel@voila.fr
Le DG de l’Office algérien interprofessionnel des céréales a déclaré courant août 2015 à la presse nationale que « l’autosuffisance en blé dur est tributaire de la superficie irriguée». Certes, l’irrigation est un facteur décisif de rendement dans les conditions semi-arides de notre agriculture. Nous ne doutons pas de la bonne volonté du DG, cependant, son raisonnement reste partiel. Il existe d’autres facteurs essentiels à l’augmentation des rendements.

IRRIGATION, COURRIR APRES LES MIRACLES
En privilégiant l’irrigation le DG de l’OAIC met au second plan le semis direct. Or, que ce soit aux Maroc, en Tunisie ou en Algérie, des essais mais aussi la pratique de grandes exploitations céréalières montrent que :
-seul le semis direct sans labour, en année sèche, est en mesure de permettre un rendement correct (il faut savoir qu’en année sèche les fellahs n’arrivent même pas à rembourser les crédits Rfig),
-seul le semis direct en écartant l’opération longue et couteuse du labour permet de réduire les coûts de mécanisation (il faut savoir que la céréaliculture n’est rémunératrice que parce que les pouvoirs publics achètent au fellah le blé 40% au dessus du prix mondial),
-seul le semis direct permet d’emblaver de grandes surfaces de céréales en respectant les dates de semis optimales. Il faut savoir qu’en Algérie les semis se prolongent jusqu'en décembre alors qu’ils devraient être terminés un mois plus tôt.
Puis, toutes les surfaces céréalières ne pourront pas être irriguées. Il faut pouvoir proposer des améliorations techniques à l'ensemble du million de familles vivant de l'agriculture. En ignorant cela, l’OAIC rend un mauvais service à la production des céréales en Algérie. Le combat de Mr Belabdi devrait être que le maximum de surfaces soient irriguées et que des semoirs pour semis direct made in DZ voient le plus vite le jour.

DONNER AU FELLAH UNE CANNE A PECHE
Tout un chacun connait le principe : il faut mieux donner à quelqu’un qui a faim une canne à pêche qu’un poisson. Ce principe est à appliquer en zone céréalière. C’est aux CCLS de se préoccuper des nouvelles techniques pouvant permettre de produire plus et moins cher dans leur zone.
Pour adapter une gestion efficace, ce n’est pas à la tutelle, à partir d’Alger, de décider de la façon dont le fellah doit cultiver à l'intérieur du pays. C’est au fellah réunit au sein d’un conseil d’administration de sa coopérative de demander aux techniciens céréaliers embauchés par ladite coopérative de leur indiquer les meilleurs itinéraires techniques correspondant à leur zone de culture. C’est ainsi que fonctionnent les coopératives céréalières à travers le monde. Que ce soit en France (où nous avons vu de nos propres yeux ce fonctionnement), en Nouvelle-Zélande ou en Australie. Il n’y a qu’en Algérie que nous faisons autrement. Et chacun connait le résultat : des importations croissantes de céréales.

PRODUCTION DE CEREALES, IRRIGATION MAIS AUSSI NEURONES
Nous n’appelons pas ici au démantèlement de l’OAIC. D’autres s’en chargent en appelant à l’adhésion de l’Algérie à l’OMC. Une partie de la céréaliculture marocaine à été ruinée suite à telle adhésion. Les écrits en ligne des agro-économistes Jean-Louis Rastoin et El Hassan Benabderrazik de l’IPEMED* en témoignent. Nous conseillons à chacun de lire leur analyse des filières céréales et oléagineux au Maghreb.
La question est autre. Il s’agit de faire évoluer le statut des CCLS pour en faire de réelles coopératives. Actuellement ce ne sont que des dépôts et silos d’un office : l’OAIC. Parler à leur propos de « coopérative » c’est dévoyer le sens de ce terme. C’est tromper les paysans algériens sur ce que peut être une vraie coopérative. Nous conseillons aux décideurs du MADR et de l'OAIC d'aller visiter les coopératives céréalières françaises à qui nous achetons le blé de leurs coopérateurs. Ont-ils déjà mis les pieds dans de telles coopératives?
Arriver à de réelles coopératives céréalières en Algérie n’est pas chose aisé pour un produit si peu banal que le blé. C’est qu’en Algérie, « le blé et donc le pain est un plat ». Aussi, c’est aux intervenants de la filière céréales de se pencher sur la question afin de trouver les solutions les mieux adaptées à nos conditions, aux conditions de l’heure et aux conditions du plus grand nombre : agriculteurs comme consommateurs.

OAIC, COMME A SONELGAZ?
On le voit, l’irrigation n’est qu’un paramètre de l’équation. Il est navrant de constater que la direction de l’OAIC n’ait qu’une vue partielle de la question. Certes, l’OAIC est un office sous tutelle et on ne peut accabler son DG qui par ailleurs peut se taguer d'un beau bilan et ne ménage pas ses efforts. Comme on ne peut accabler Mr Bouterfa DG de Sonelgaz qui croule sous les dettes et dont la tutelle interdit toute augmentation de tarifs.

Le réveil sera brutal. Autant se réveiller le plus tôt possible et en douceur…

Notes:
(*)  http://www.ipemed.coop/adminIpemed/media/fich_article/1404979543_IPEMED%20-%20C%C3%A9r%C3%A9ales%20et%20ol%C3%A9oprot%C3%A9agineux%20au%20Maghreb.pdf

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